D’HABITUDE, quand on parle de revenus et dépenses des ménages, on fait allusion aux conditions de vie des populations. Les spécialistes de la statistique définissent le ménage comme l’ensemble des personnes vivant habituellement sous un même toit, sans forcément être unies par des liens de parenté, et ayant un budget en commun.
Le revenu par ménage, lui, est la somme des revenus de toutes les personnes composant le ménage. Ce sont par exemple les salaires, les revenus privés issus des placements et de la propriété, les transferts, les pensions… On notera que les revenus distribués dans l’économie ont pour origine le Produit intérieur brut (PIB). Que c’est en contrepartie de leur participation à la production de la richesse que les agents économiques perçoivent leur revenu, dit primaire. En réalité, l’administration publique (l’État) a dans l’économie une fonction de redistribution, qui vise à corriger certaines inégalités issues de la répartition des revenus primaires (SMIG).
Les spécialistes de la statistique expliquent que le revenu d’activité constitue la majeure partie des revenus des individus et des ménages. L’analyse de cet indicateur permet d’apprécier non seulement la qualité des emplois générés par les différents secteurs productifs, mais aussi de mesurer le niveau de vie et l’état de la pauvreté.
Faiblesse des revenus d’activité
En ce qui concerne la République démocratique du Congo, ils avertissent qu’il convient d’interpréter avec la plus grande précaution d’usage les données, notamment sur l’emploi. La raison est simple : les enquêtes ne portent souvent que sur les revenus provenant de l’activité principale en milieu urbain, en particulier dans la capitale. Le milieu rural étant composé à plus de 90 % d’agriculteurs.
La situation de basse conjoncture économique et les conflits armés dans l’Est du pays depuis plus de deux décennies suffisent pour attester de la faiblesse des revenus en RDC. Dans son enquête de 2004-2005, l’Institut national de la statistique (INS) évalue le revenu d’activité mensuel moyen comme suit : 27 000 francs dans la capitale et 15 400 francs dans les autres villes urbaines.
Malgré une expérience professionnelle et un niveau d’éducation plus élevés, le revenu des fonctionnaires dans la capitale est très faible avec 99 000 francs en moyenne, soit l’équivalent de ce que perçoit un actif informel non agricole. Dans les entreprises publiques de la capitale employant moins de 5 % des actifs, les employés touchent bien davantage : 200 000 francs par mois en moyenne. Et dans le secteur privé formel, les employés touchent plus de 43 000 francs.
Selon l’INS, dans le secteur institutionnel, la hiérarchie de revenus est toujours respectée, des cadres aux manœuvres. Dans l’ensemble, que ce soit en termes de revenu moyen ou médian, les femmes gagnent moitié moins que les hommes.
Pour l’INS, le niveau des revenus individuels permet d’estimer le taux de sous-emploi invisible (pourcentage d’actifs occupés gagnant moins que le salaire horaire minimum). Il touche près de 55 % de la main-d’œuvre urbaine. Si l’on y ajoute les deux autres composantes du sous-emploi (le chômage, le sous-emploi
visible, soit ceux qui travaillent moins de 35 heures contre leur gré), le taux de sous-emploi global atteint 72 % de la population active occupée urbaine (63 % dans la capitale). Le sous-emploi du facteur travail apparaît donc comme le principal problème que rencontre le marché du travail urbain.
La qualité des emplois ne dépend pas seulement des revenus qu’ils procurent mais aussi de l’ensemble des avantages auxquels ils donnent droit. En moyenne la qualité des emplois est faible. D’après l’INS, la précarité se manifeste d’abord par la faible contractualisation des relations de travail : un actif sur deux n’a aucun contrat écrit avec son employeur et six actifs sur dix ne possèdent pas de bulletin de paie.
Insatisfaction
Tous ces éléments (rémunérations, relations de travail, etc.) mis ensemble procurent un certain niveau de satisfaction dans l’emploi. Paradoxalement, 63 % de ceux qui ont un emploi en milieu urbain se déclarent satisfaits du poste qu’ils occupent et ne comptent pas en rechercher un autre dans un avenir proche. Cependant, ils sont plus de 35 % à désirer obtenir un nouvel emploi. L’insatisfaction plus importante chez les jeunes de moins de 25 ans se traduit par un profond désajustement entre leurs projets professionnels et les opportunités réelles d’emplois. Le secteur public (administration et entreprises publiques) attire encore 25 % des souhaits des jeunes urbains. Parallèlement, le secteur informel, principal pourvoyeur d’emplois avec 88 % d’emplois créés en milieu urbain, n’attire que 45 % de ces derniers.
Le marché du travail en RDC met en relief les défis majeurs auxquels est confronté le gouvernement. Le pays semble enfin sortir d’une récession sans précédent, l’effort de guerre ayant mis à mal toute l’économie, grâce à la hausse des cours des matières premières à l’international. En s’engageant dans la voie de la paix et dans le redressement économique, le gouvernement espère qu’une dynamique du marché du travail se traduira par de meilleures conditions de vie des ménages congolais.
Sur l’ensemble du pays, on compte près de 3,5 millions de personnes en âge de travailler (10 ans et plus). Six personnes sur dix sont actives (ayant un emploi ou chômeur), soit un taux d’activité de 61 %. Les taux entre urbain et rural soulignent une différence de 20 points (respectivement 47 % et 67 %), l’activité agricole absorbant certainement davantage la population rurale. Située en-dessous de la moyenne urbaine, Kinshasa enregistre le taux le plus faible avec seulement 43 % d’actifs. À l’échelle de la population de 15 ans et plus, le taux d’activité gagne plus de 10 points en passant à 71,6 % au niveau national.