L’agence d’évaluation financière américaine Moody’s Investors Services a affirmé dans une note adressée au gouvernement, le 7 mai, que « les réformes économiques en République démocratique du Congo sont susceptibles de porter des fruits à moyen terme». Pour Moody’s, depuis 2010, la RDC s’est engagée sur la voie des réformes courageuses visant à promouvoir une croissance « forte ». Au nombre des mesures déjà prises, elle a évoqué, notamment, la loi sur la passation des marchés publics qui fait obligation de les publier, la modernisation des instruments de gestion des finances publiques, l’introduction de la taxe sur la valeur ajoutée (TVA), l’entrée dans le système OHADA et le renforcement de la politique de décentralisation.
Moody’s, qui suit de près, depuis quelques années, la situation économique du pays demande au gouvernement de mettre un accent particulier sur les réformes liées à « la gestion des finances publiques », car elles permettent de maximiser les recettes, réduire la fraude, enrayer la corruption et de mettre des garde-fous solides pour éviter le coulage des recettes. Cette recommandation vise particulièrement les régies financières que sont la Direction générale des impôts, (DGI) , la Direction générale des douanes et accises (DGDA) et la Direction générale des recettes administratives, domaniales et de participation (DGRAD) où l’on déplore fréquemment les fléaux qui amenuisent le volume des recettes de l’Etat. Les autres services d’assiette qui contribuent pour une large part au Trésor public sont également interpellés. Il s’agit par exemple des secteurs des mines, des affaires foncières, de l’urbanisme, du tourisme, de l’énergie et de l’agriculture.
Améliorer la transparence et la gouvernance
Par ailleurs, l’agence note que la nouvelle loi sur les hydrocarbures, votée au Parlement, et qui attend sa promulgation par le chef de l’Etat et la volonté affichée d’améliorer la transparence et la gouvernance dans le secteur minier, notamment la révision du Code minier en gestation, sont des signes forts qui indiquent la détermination du gouvernement à aller de l’avant.
Moody’s estime que, si cet élan se poursuit, l’économie congolaise marquera des points importants au profit de la croissance. A contrario, elle rappelle que, malgré ses richesses considérables (sol, sous-sol, mines, potentiel hydroélectrique, forêt, ressources en eau), la RDC occupe la dernière place à l’indice du développement humain établi par les Nations unies. Depuis son indépendance, en 1960, ce pays d’environ 76 millions d’habitants, a été saigné à blanc pendant des décennies à cause de la mauvaise gestion. Le pays n’a pas été épargné par les différentes guerres particulièrement à partir de 1996. Jusqu’à ce jour, la RDC est mal classée en matière de gouvernance et de climat des affaires. Moody’s, qui perçoit déjà « une dynamique positive », est persuadé qu’à long terme, les principaux indicateurs économiques seront totalement maîtrisés et permettront au pays de réduire la pauvreté. Toutefois, l’agence met en garde : le chemin à parcourir reste encore long. Pour rappel, la célèbre agence avait accordé à la RDC, en septembre 2013, la notation B3, une note intermédiaire marquée à la fois par des faiblesses et des perspectives stables.
Force et faiblesses de l’économie
Par rapport aux faiblesses, le rapport Moody’s relevait alors que l’économie congolaise demeurait très fragile, mais disposait d’un potentiel de croissance très important. Moody’s regrettait également la précarité des institutions congolaises, la plus grande faiblesse qui fait que la RDC est toujours mal cotée. Pour avoir respecté les règles de l’initiative Pays pauvres très endettés, (PPTE), elle est passée de la note C à B. Une bonne partie de sa dette extérieure a alors été annulée en 2010. Malgré les faiblesses de l’économie congolaise, l’agence notait des signes d’espoir, notamment la maitrise de l’inflation, du taux de change, etc.
Dans le système de notation de l’agence, la pire des notes est le C, ce qui signifie que l’emprunteur est en situation de défaut de paiement. S’il fallait classer les catégories des emprunteurs en quatre groupes, par ordre croissant du risque, la note de la RDC se situerait dans le troisième groupe mais à la dernière place. Sa dette présente donc un risque de crédit élevé mais n’est pas considérée comme de « mauvaise qualité » ou « présentant un risque de crédit très élevé ».
La perspective stable, contrairement à une perspective négative et positive, signifie que l’agence ne s’attend pas à un changement significatif à court terme dans un sens comme dans l’autre, sauf événements exceptionnels.
- INFO BOX
- L’agence de notation Moody’s, officiellement Moody’s Corporation, est une holding de Moody’s Analytics, un fournisseur de solutions de gestion des risques, et Moody’s Investors Service, une société américaine active dans l’analyse financière d’entreprises commerciales ou d’organismes gouvernementaux. Moody’s est également connue pour ses notations financières standardisées des grandes entreprises en fonction du risque et de la valeur de l’investissement. Elle détient 40 % de parts de marché dans le domaine de l’estimation de crédit au niveau mondial. Ses principaux concurrents sont Standard & Poor’s (S&P), Fitch Ratings et Dagong.
- Moody’s a été fondée en 1909 par John Moody, journaliste financier reconverti, qui crée la notation avec pour mission de jauger les risques des entreprises en s’appuyant sur une grille de notes, qui permet de résumer les risques pris par le créancier, de la même manière qu’un banquier le fait pour un privé.
- C’est Moody’s qui introduisit les symboles de son échelle de notation, les fameux « triple A to C ». La notation est une appréciation de Moody’s sur la volonté et la capacité d’un émetteur à assurer le paiement ponctuel des engagements d’un titre de créance, tel qu’une obligation, tout au long de la durée de vie de celui-ci. L’échelle de notation, qui va d’un maximum de Aaa à un minimum de C, se compose de 21 crans (notch) et de deux catégories : la catégorie d’investissement et la catégorie spéculative. La notation la plus basse de la catégorie d’investissement est Baa3. La notation la plus élevée de la catégorie spéculative est Ba1. La notation concerne aussi bien les dettes à long terme (maturités équivalentes à un an ou plus) et à court terme (maturité inférieure à un an).