«JE PENSE que le moment est venu pour Inga III qui est stratégique pour l’Allemagne et l’Europe en matière d’hydrogène », assure Günter Nooke, le commissaire du chancelier fédéral allemand pour l’Afrique. Il table sur le fait que le projet Inga III permettra de « produire réellement en grande quantité de l’hydrogène qui fournit de l’électricité bon marché et de créer une valeur ajoutée en Afrique ». Pour Günter Nooke, cela est un enjeu vraiment décisif : « Ce que veut exactement le gouvernement allemand, c’est de s’assurer justement que tout le monde comprend cet enjeu. La République démocratique du Congo entourée de neuf voisins est l’un des pays les plus importants d’Afrique. »
L’intérêt de l’Allemagne pour l’Afrique n’est pas qu’économique et géostratégique, laisse entendre Günter Nooke : « Nous voulons simplement que l’Afrique et les Africains se portent bien. L’intérêt de l’Allemagne est que le bien-être de l’Afrique se fasse en Afrique. Et cela signifie que nous, en tant que gouvernement fédéral et ministère du Développement, nous voulons aider les pays africains à faire avancer leur développement économique. »
Ce commissaire fédéral allemand a étudié la physique à Leipzig. Depuis 1985, dit-il, son combat a été de dire : « L’avenir ne réside que dans l’hydrogène ». Cela découle, dit-il, logiquement des sciences naturelles. Et aujourd’hui, la question est : « Comment produire vraiment l’hydrogène bon marché, comment produire du carburant artificiel, vraiment neutre en CO2 ? » Et Günter nous dit que le gouvernement allemand a déjà adopté une stratégie sur l’hydrogène, que l’Union européenne (UE) veut, pour sa part, un grand deal. Décryptage : « L’Allemagne veut une vraie politique africaine pour jouer un grand rôle géopolitique en Afrique. Cela cadre avec le projet Inga III qui permet de produire beaucoup d’hydrogène en Afrique. En effet, l’hydrogène fournit de l’électricité, et elle est si bonne en RDC. »
Mission de repérage
C’est grâce à un homme, Gernot Wagner, consulaire honoraire de la RDC en Leipzig, que les Allemands s’intéressent aujourd’hui à la RDC. « Je pense que le consul honoraire Wagner y est pour beaucoup. Je pense que c’est une personne qui a toujours bien représenté la RDC en Allemagne. Je suis vraiment impressionné par le travail de Wagner pour l’Afrique et la RDC », l’encense Günter Nooke.
En effet, dit-il, tous les projets ont besoin de gens pour les faire avancer. « Il ne suffit pas seulement de dire que cela semble intéressant pour avoir raison. Il faut donc quelqu’un pour prendre l’idée ou le projet en charge », fait-il remarquer. Avant de confier que lui et Wagner ont longuement échangé sur le projet hydrogène en mars. Et depuis : « Wagner a fait bouger beaucoup de choses. Félix Antoine Tshisekedi, le président du Congo, a répondu favorablement. Je ne m’y attendais pas vraiment. Je pense sincèrement que le gouvernement fédéral allemand est impressionné. »
Mi-août, Gernot Wagner a conduit une délégation des investisseurs allemands venus en repérage en RDC. Ils ont été reçus à la présidence de la République par Désiré Casimir Kolongele Eberande qui assume l’intérim du directeur de cabinet du chef de l’État. D’après cet homme d’affaires allemand, le but de la mission a été celui de « matérialiser les contacts avec les officiels congolais », notamment dans les secteurs de transport (chemin de fer) et de l’énergie (projet Grand Inga et projet hydrogène).
Que de projets ambitieux ! En ce qui concerne le ferroviaire, les Allemands visent l’interconnexion des corridors : Banana-Kinshasa ; Kinshasa-Ilebo ; Ilebo-Tenke, la connexion avec Angola ; Kilolo-Kolwezi ; Lubumbashi-Sakanya, la frontière avec la Zambie et la connexion avec le Kasaï. La mission des investisseurs allemands s’est rendue le vendredi 14 août au site d’Inga où elle a été accueillie par Atu Matubuana, le gouverneur de la province du Kongo-Central. Sur place, les Allemands ont été briefés sur le fonctionnement des centrales Inga I et II. La visite leur a permis de projeter les travaux du Grand Inga. Puis, un détour au port de Matadi par où vont transiter les matériaux et les équipements pour la construction d’Inga III.
Une femme d’affaires membre de la délégation a lâché : « Inga III doit vraiment voir le jour, avec la technologie allemande. » D’après Gernot Wagner, les experts sont déjà à pied d’œuvre pour les études de faisabilité. Les investisseurs allemands qui sont venus en repérage ont laissé entendre que la RDC est un pays qui regorge d’énormes potentialités, ayant une population intelligente et jeune qui veut travailler avec des partenaires extérieurs. Cependant, difficile de savoir si cette mission des investisseurs allemands est une initiative privée ou une démarche officielle, faisant suite à la visite officielle en novembre dernier de Félix-Antoine Tshisekedi Tshilombo en Allemagne. Il avait été reçu à Berlin par Angela Merkel, la chancelière allemande, ainsi que par des hommes d’affaires allemands.