Qui sont-ils, ceux qui arrivent ?

Avant même que le secteur ne s’ouvre à la concurrence, on assiste à un empressement tous azimuts des majors. Dans l’opinion, on redoute que la libéralisation ne soit synonyme de prédation ou de blanchiment d’argent.

Ce n’est qu’une partie remise. Le nouveau code des assurances devait sortir ses effets, le 17 mars dernier, une année après sa promulgation. Il devra s’appliquer aux opérations d’assurance et de réassurance réalisées en République démocratique du Congo, à l’exception des opérations d’assurance relevant de la sécurité sociale. Mais c’est déjà de bonne guerre. La Rawbank a battu ses cartes. Elle affiche son ambition de devenir le leader dans ce secteur. Un grand groupe émirati entend lui disputer ce leadership à venir en République démocratique du Congo, au moment où ce secteur y engage un tournant décisif de son histoire. « C’est du solide, c’est du sérieux », a indiqué le point focal de ce groupe à Kinshasa, qui n’a pas voulu en dire plus parce que l’information est encore frappée d’embargo. Toutefois, le nom de ce groupe ainsi que sa vision dévoilés lors d’un point de presse que des responsables de ce groupe avaient prévu à Kinshasa à la veille de la supposée entrée en vigueur du code des assurances. Depuis la promulgation de cette loi, une dizaine de multinationales attendent le go head pour se partager les parts du marché.

La Fédération des entreprises du Congo (FEC) s’est félicitée de l’ouverture de ce secteur au libéralisme étant donné que l’économie nationale demeure fragile car principalement tributaire du secteur minier. D’où la nécessité de la diversification. La FEC y voit un créneau susceptible d’attirer davantage d’investissements dans l’avenir. La libéralisation est un pas de plus dans la bonne direction dans l’amélioration du climat des affaires. Sur ce plan, la FEC note des avancées législatives favorables aux opérateurs économiques. Est-ce cela qui justifierait cet empressement observé des majors des assurances et de la réassurance ? Un ancien cadre de la Société nationale d’assurances (SONAS) à la retraite espère que le code des assurances évitera au pays une vaste escroquerie. À la seule condition qu’il offre aux opérateurs économiques et aux consommateurs un cadre libéral, attractif, juste, exigeant et sécurisant. Il est censé organiser les conditions d’une saine concurrence destinée à aboutir à une optimisation des choix et des coûts pour les assurés. D’après cet expert des assurances qui se prépare à exercer comme consultant, la nouvelle loi devrait offrir aux acteurs les garanties d’une grande impartialité et d’un interventionnisme étatique réduit à sa plus simple expression.

Solvabilité et transparence

Parmi ces garanties, les règles sur la solvabilité des compagnies postulantes et sur la transparence totale des flux financiers. L’origine des fonds d’établissement doit être clairement identifiée. Il faut éviter de tomber dans le piège de la prédation, du blanchiment d’argent et du terrorisme. Avec la démonopolisation du secteur des assurances, nombreux sont ceux qui voudront vendre les produits d’assurance. Par rapport aux offres, ils devront proposer aux consommateurs une gamme plus large et répondant à leurs besoins. Selon Godelive de Cordier, responsable du conseil en management au sein du cabinet Ernst & Young, les produits et services proposés ne sont pas toujours en adéquation avec les besoins locaux. Pour y arriver, les investisseurs sont appelés à connaître les spécificités du marché. Chaque entreprise devrait mettre en place son réseau de distribution. Dans l’esprit de la nouvelle loi, seules les sociétés anonymes ou les mutuelles sont habilitées à exercer dans ce secteur. Toutefois, elle aura effet sur les opérations d’assurance directes et de réassurance souscrites par des entreprises agréées en complément et après préavis de garantie accordée par la sécurité sociale. C’est un nouvel instrument juridique qui vient s’ajouter à l’arsenal de réformes en vue de l’assainissement du climat des affaires.

Marché à fort potentiel

De l’avis unanime des organismes d’assurances internationaux, il y a un marché à fort potentiel au Congo à plus d’un titre. Les perspectives du marché des assurances des personnes sont importantes ; le pays étant en pleine reconstruction, le développement du secteur des infrastructures ainsi que celui de la construction connaissent une croissance accrue ; la croissance économique attire beaucoup d’investisseurs. Selon Gras Savoye, courtier en assurances, il y a une corrélation directe entre la croissance du Produit intérieur brut (PIB) et le développement du marché des assurances. Pour réussir la mutation du secteur des assurances, le gouvernement a fait recours au cabinet privé Ernst & Young, spécialisé dans le domaine des assurances, pour présenter les opportunités d’affaires dans ce secteur. D’après ce consultant, le marché des assurances en République démocratique du Congo est peu développé, voire quasi-inexistant. Le taux de pénétration avoisine 0,40 % alors qu’il est d’environ 1,5 % dans les pays voisins. Ancien administrateur-délégué général de la SONAS, Herman Mbonyo pronostique que le pays deviendra avec le nombre des primes qu’il va engranger à travers la libéralisation, la plaque tournante des crédits sur les marchés africains parce qu’étroits, soit démographiquement, soit géographiquement.