Radioscopie de l’économie de la RDC

On ne peut pas bien appréhender la situation actuelle si l’on n’a pas une rétrospective sur les vicissitudes du tissu économique de la RDC à travers son histoire politique.

Jusqu’au début des années 1970, l’économie de la République démocratique du Congo était dynamique. Le Zaïre a connu une débâcle économique pendant plus de trois décennies (1980-2000), à cause de la mauvaise gouvernance politique, les mauvaises décisions économiques mais aussi les rébellions qui ont ravagé le pays de 1996 à 2003. L’agriculture reste le principal secteur de l’économie. Elle représente (57,9 %) du Produit intérieur brut (PIB) et occupe (66 %) de la population active. Avant la colonisation, l’activité économique était fortement dépendante de la nature et florissante dans les organisations politiques (royaumes). La fondation de l’État indépendant du Congo (EIC), considéré comme une « propriété privée » de Léopold II, roi des Belges, a mis fin aux systèmes socio-économiques existants.

Le contexte international de l’époque est favorable au libéralisme économique. Entre 1885 et 1891, il bat son plein. Le commerce privé est encouragé et est entièrement libre, sans doute du fait de besoins financiers pour mettre en valeur la jeune colonie. Le Congo sous l’EIC est à la merci d’une exploitation en régie des terres domaniales et des prestations en nature par l’impôt de capitation. Sous la colonisation belge (1908 -1960), Tanganyika Concession découvre des richesses minières importantes au Haut-Katanga. Le Comité spécial du Katanga la charge de mener la prospection. La firme confirme ainsi les découvertes de Cornet, géologue de la mission Bia-Franqui en 1896.

Une puissance en devenir

Après tout le travail réalisé sous l’ère EIC, malgré les critiques, le Congo-Belge était une colonie en pleine croissance économique, impulsée par l’État, les sociétés privées et les missionnaires. Ceux-ci se sont intéressés aux ressources naturelles, minières et agricoles. C’est ainsi qu’à partir de 1920, de nombreux investissements directs étrangers (IDE) ont débarqué dans la colonie belge. Par exemple, il y a eu 35 milliards de francs de 1921 à 1931, ou le tiers des capitaux cumulés en 74 ans (1887-1959). En forte augmentation, les exportations de l’époque portaient principalement sur l’or, le diamant, le cuivre, l’ivoire, le copal et l’huile de palme.

En 1924, le Congo-Belge est frappé par la première crise, partiellement amortie par l’industrie minière (exploitation du cuivre). Cinq ans après, il est touché par la Grande Dépression. La conséquence est que son PIB régresse. Les dépenses publiques sont restées relativement élevées grâce notamment à une forte trésorerie ou excédent budgétaire antérieur et au crédit exceptionnel du budget extraordinaire qui ont permis d’achever le plan de grands travaux. À partir des années 1940 jusqu’à l’indépendance, l’industrie se développa fortement, en particulier pendant les années de la Seconde Guerre mondiale. Les exportations ont doublé et les importations quintuplé. La production industrielle a également augmenté. Les investissements publics ont atteint 64,6 milliards de francs en 1956, essentiellement dans le cadre du Plan décennal.

Heurs et malheurs de l’indépendance

Après l’indépendance, les quotas à l’importation ont renforcé l’industrie nationale. Mais c’est aussi le début des problèmes politiques et des difficultés économiques, notamment à cause de la baisse des matières premières. La colonisation a légué au nouvel État une économie productive et équipée. Cependant, depuis 1957, la croissance ne suit pas à cause surtout des récessions conjoncturelles, d’une baisse des investissements privés et de la fuite massive des capitaux. L’économie résiste malgré tout, grâce au dualisme économique et à la prédominance des étrangers.

Le régime Mobutu a instauré un régime de clientélisme fondé sur la corruption et l’impunité. Le régime a imposé une mainmise sur l’économie pour en détourner les profits au détriment de la population. Par exemple, les mesures de nationalisation (zaïrianisation) et de radicalisation ont désorganisé le tissu économique pendant deux décennies (1970-1990). Et les pillages de 1991 et 1993 ont donné le coup de grâce. Depuis, le secteur informel, estimée à trois fois le montant officiel du PIB emploie la majeure partie de la population.

Confronté durement dans les années 1980 aux déséquilibres financiers, à l’endettement et à la baisse constante de la production, le Zaïre n’avait plus d’autres choix que d’adopter les politiques de stabilisation et d’ajustement structurel recommandées par le Fonds monétaire international (FMI) et la Banque mondiale. Malgré les programmes économiques financés par les deux institutions financières internationales, l’inflation et la dette n’ont fait qu’accroître. Au point qu’à partir de 1990, la Banque mondiale et le FMI ont suspendu leur assistance, à la suite de la suspension de la coopération bilatérale par les principaux pays occidentaux. Ces pays imposèrent des sanctions au Zaïre à cause du supposé massacre des étudiants à Lubumbashi. Dans ce contexte, comment faire face aux engagements internationaux ? Le FMI a coupé les lignes de crédit en février 1992, et la Banque mondiale l’a suivi en juillet 1993. La mise en circulation d’une nouvelle monnaie, le Nouveau Zaïre (NZ) par le gouvernement Birindwa aura été une catastrophe, consacrant l’existence des deux zones monétaires dans le pays, les anciens zaïres circulant dans l’espace kasaïen et le Nouveau Zaïre sur le reste du territoire national. L’inflation a atteint 9 800 % en 1994.

La réforme monétaire 

Avant 2001, l’économie a été caractérisée par un tissu industriel délabré, des infrastructures socio-économiques de base totalement détruites, un chômage de masse important, une inflation galopante avoisinant les 4 000 % l’an, un taux de croissance en net recul de -14 % en moyenne par an, un revenu per capita de l’ordre de 80 dollars par an, une monnaie chancelante ayant perdu nombre de ses fonctions primaires et un différentiel entre le taux de change officiel et parallèle de l’ordre de 150 %. Ces contreperformances ont entraîné des coûts très élevés à l’économie nationale en termes de perte de compétitivité et baisse de production.

Avec l’accession de Laurent-Désiré Kabila au pouvoir en mai 1997. Le nouveau régime a suscité un immense espoir tant le pays était en ruines. Les entreprises publiques sont mises à contribution pour entamer un programme de reconstruction et tenter d’assainir la situation économique. Dans ce contexte, la réforme monétaire a été envisagée et appliquée en 1998. Des actions ont été également menées pour le rétablissement de l’économie du pays…

Les finances publiques étaient exsangues à cause de la corruption et de détournement de fonds. Et les rébellions de 1998 à 2003 ont été à l’origine du déclin de l’économie : la RDC a été divisée entre une zone gouvernementale et plusieurs zones rebelles, sans liens économiques entre elles. Suite à l’inflation du fait de la guerre, le gouvernement tenta de réguler les prix par des lois (taux fixe sur la parité de 50 FC pour 1 dollar, soit CDF/USD = 50) et de contrôler les exportations. Ce qui n’a pas manqué d’affecter les activités liées au commerce extérieur. L’effort de guerre a drastiquement réduit la marge de manœuvre en matière de recettes et a accru la dette extérieure. L’incertitude sur l’issue du conflit et la pression fiscale ont fini par dissuader les investisseurs.

Les ressources de l’Est du pays sont encore exploitées par les forces rebelles ou les occupants étrangers. Le Rwanda est devenu par exemple exportateur de diamants et de coltan, bien que n’en disposant pas sur son territoire. EN 2001, le Fmi et la Banque mondiale ont lancé avec le nouveau gouvernement le processus de restauration de l’économie à travers des plans économiques cohérents et les réformes institutionnelles. Les conditions économiques se sont améliorées depuis 2002, à la suite de plusieurs missions du FMI et de la Banque mondiale afin de mette en œuvre les premières réformes.