RDC: la direction de la Gécamines veut redonner à l’entreprise son éclat d’antan

La direction de la société minière publique Gécamines (cuivre, cobalt) veut ressusciter cet ancien joyau de la République démocratique du Congo (RDC) grâce à une ambitieuse politique d’investissements lui permettant de retrouver une production de minerais forte et concurrentielle.

Dans un entretien avec l’AFP, le président du Conseil d’administration de l’entreprise, Albert Yuma, explique l’action menée par la nouvelle équipe dirigeante installée en 2010 pour sortir la GECAMINES du marasme.

En arrivant, explique M. Yuma, on «a tiré un constat terrible» : «technologie complètement surranée», «effectif pléthorique, plus de 11.000 travailleurs avec une moyenne d’âge de 56 ans», et «comme seule source de réserves connues une mine qui avait une estimation non certifiée de plus ou moins 200.000 tonnes».

«Dans les années 70, la GECAMINES était la première firme productrice de cuivre au monde» et assurait «60% du budget de l’Etat», rappelle M. Yuma, dont l’entreprise a vu sa production de cuivre culminer à près de 500.000 tonnes à la fin de la décennie 1980. Elle n’en a produit «péniblement» que 35.000 en 2013, «et de mauvaise qualité», ajoute ce quinquagénaire, également président de la Fédération des entreprises du Congo (patronat). La GECAMINES a périclité avec l’Etat et les deux guerres qui ont ravagé le pays de 1996 à 2003. Au tournant du siècle, les caisses publiques sont vides, et les plus belles mines du groupe (cuivre et cobalt essentiellement) sont cédées à des conditions extrêmement avantageuses à des investisseurs privés, la GECAMINES n’en conservant que des participations minoritaires. Après l’audit de l’entreprise, la nouvelle direction a entrepris un examen de ces co-entreprises.

Objectif: récupérer l’intégralité de l’exploitation des mines dont les partenaires n’ont pas respecté leurs obligations. «On a bataillé pendant plus d’un an et nous avons fini par récupérer à l’amiable moyennant paiement la mine de Desiwa, qui a des réserves certifiées selon les normes internationales de 5 millions de tonnes de cuivre et de 500.000 tonnes de cobalt», raconte M. Yuma.

Desiwa, comme la plupart des mines de la GECAMINES se trouve dans l’extrême Sud-Est du pays, dans la ceinture du cuivre autour de Lubumbashi et Kolwezi. Tout récemment, l’entreprise remet la main sur trois autres concessions et tient ainsi «8 millions de tonnes de réserves de cuivre certifiées».

Cela autorise un «vrai projet minier industriel», en rendant possible une production de «200.000 ou 250.000 tonnes de cuivre pendant 20 ans», explique M. Yuma, «c’est le minimum pour que les banquiers fassent attention à vous». Les usines sont tellement vieilles qu’il n’est pas rentable de les moderniser. La GECAMINES veut donc en construire trois nouvelles d’une capacité totale combinée de 310.000 tonnes de cuivre à moyen terme.

Il faut aussi «réduire de moitié l’effectif» pour réduire les coûts de production (10.000 dollars la tonne de cuivre, quand la concurrence est à 3.000-3.500 et le prix du marché autour de 7.000-8000 dollars), ajoute M. Yuma. Pour tout cela, l’entreprise a besoin de 2,1 milliards de dollars, auxquels s’ajoutent 500 millions d’euros pour la construction d’une centrale thermique qui utilisera les «énormes réserves de charbon» dont dispose la société afin de fournir l’énergie «sans laquelle rien ne pourra se faire». Aux termes du plan retenu, la centrale doit entrer en service en 2016, en même temps que l’usine de Desiwa, qui commencerait à produire 100.000 tonnes par an. L’Etat n’ayant «pas les moyens» de financer ces projets, la société minière compte transférer toutes ses participations minières dans «une entité juridique autonome et indépendante du passif de l’entreprise» (environ 1,8 milliard de dollars) «qui lèvera des fonds sur les marchés internationaux». Le groupe cherche aussi du capital frais et envisage pour cela de vendre certaines participations dans des mines qui n’apportent pas les retours escomptés. M. Yuma assure que contrairement à certaines pratiques du passé, cela se fera en toute transparence.