Selon la Banque mondiale, les mariages d’enfants font perdre des dizaines de milliards de dollars à l’Afrique

La pratique du mariage précoce en Afrique représentera un fardeau financier que les pays africains auront du mal à supporter. C’est ce que souligne un rapport de la Banque mondiale publié le 20 novembre, à l’occasion du 2è Sommet de la Commission de l’UA à Accra au Ghana consacré justement à ce fléau.

SELON ce rapport intitulé « Éduquer les filles et mettre fin au mariage d’enfants : une priorité pour l’Afrique », publié avec le soutien de Children’s Investment Fund et du Partenariat mondial pour l’éducation, plus de trois millions de filles (soit un tiers) se marient encore avant l’âge de 18 ans en Afrique subsaharienne. Il s’agit de la partie du continent où la prévalence de mariage d’enfants est la plus élevée, surtout chez les filles. Il a été constaté que les filles qui se marient avant l’âge de 18 ans sont beaucoup plus susceptibles d’abandonner leurs études et ont un niveau d’instruction plus faible que celles qui se marient plus tard. Elles ont également plus de chance de tomber enceinte et d’avoir des enfants très tôt, mettant ainsi en danger leur santé ainsi que l’éducation et la santé de leurs enfants.

Alors que de nombreux pays africains ont atteint la parité entre les sexes dans l’enseignement primaire, le rapport note que les filles sont à la traîne par rapport aux garçons au niveau secondaire. En Afrique subsaharienne, sept filles sur 10 achèvent leurs études primaires, mais seulement quatre filles sur 10 terminent le premier cycle du secondaire. En moyenne, les femmes qui ont fait des études secondaires ont plus de chance de travailler et gagnent deux fois plus que celles qui n’ont pas fait d’études. 

Le manque à gagner

Après avoir analysé 12 pays d’Afrique subsaharienne et du Maghreb, qui abritent la moitié de la population du continent africain, le rapport estime que le mariage précoce des filles représente un manque à gagner de 63 milliards de dollars en matière de revenus et de capital humain suite à son impact négatif sur leur éducation. « L’enseignement primaire pour les filles n’est tout simplement pas suffisant. Les filles retirent le plus de bénéfices de l’éducation lorsqu’elles sont capables de terminer leurs études secondaires », explique Quentin Wodon, économiste principal à la Banque mondiale et auteur principal du rapport. « Malheureusement, très souvent elles ne restent pas à l’école si elles se marient tôt. »

Le mariage d’enfants entraîne également des taux de fécondité élevés et une croissance démographique plus forte, note le même rapport. Si l’on mettait un terme aujourd’hui à cette pratique, la croissance démographique diminuerait. Cela entraînerait une amélioration des niveaux de vie, en particulier pour les plus pauvres. Par ailleurs, le rapport confirme que l’un des meilleurs moyens d’éviter le mariage d’enfants est de scolariser le plus longtemps possible les filles. Chaque année d’études secondaires réduit d’au moins cinq points de pourcentage le risque de se marier avant l’âge de 18 ans.

Mariage d’enfants

Le rapport décrit également l’impact du mariage d’enfants et de l’éducation des filles sur une quarantaine d’autres indicateurs. Par exemple, le mariage précoce des filles augmente le risque de violences conjugales et réduit la capacité des femmes à prendre des décisions au sein du ménage. Il affecte également la santé des enfants de jeunes mères, notamment avec des risques plus élevés de mortalité et de retard de croissance (malnutrition) chez les enfants de moins de cinq ans.

L’éducation des filles et la promotion de l’égalité entre les sexes font partie d’un effort global de la Banque mondiale qui comprend des financements et des travaux analytiques visant à maintenir les filles à l’école, éviter le mariage d’enfants, améliorer l’accès aux services de santé reproductive et renforcer les compétences et débouchés professionnels des femmes.