UNE BANQUE sur trois pourrait mettre la clé sous le paillasson au cours des prochains mois, indique une étude publiée le mardi 22 octobre par le cabinet McKinsey. Au total, 354 banques sont concernées. L’étude, menée sur 984 banques à travers le monde, révèle en effet que 354 d’entre elles sont menacées de disparition. Il s’agit pour la majorité d’établissements bancaires d’Europe de l’Ouest (37 %) et de pays développés d’Asie (43 %).
McKinsey indique notamment que les banques ont connu une rentabilité d’environ 3,6 % entre 2010 et 2018, contre 16,8 % entre 2002 et 2007. Par ailleurs, 35 % des établissements affichent une rentabilité moyenne de 1,6 % sur les trois dernières années, alors que les meilleurs d’entre eux ont généré une rentabilité de 17,1 %. Les banques les plus fragiles disposent d’une dernière chance pour « se construire une taille significative via des acquisitions ou en restructurant leurs modèles d’activité avant qu’il ne soit trop tard », souligne le rapport.
Le défi majeur
« Ce qui peut rendre particulièrement alarmiste, au-delà des enjeux industriels et stratégiques déjà connus pour les banques, c’est le ralentissement de la croissance. On pourrait arriver en bout de cycle », confie un senior partner chargé du secteur financier chez McKinsey et cité par Les Échos. Le 15 octobre dernier, le Fonds monétaire international (FMI) avait de nouveau revu ses prévisions à la baisse, annonçant une croissance mondiale de 3 %.
Aujourd’hui, en 2019, les banquiers ont perdu la tête, mais en 1789 aussi. Maintenant il faut instaurer la taxe Tobin sur les flux financier pour éponger les dette des pays ainsi que nationaliser les banques pour 1 euro symbolique et mettre en prison à vie les banquiers coupables de cette situation avec saisis de leurs biens personnels, puis faire comme en Islande garantir les comptes et l’épargne des clients et annuler les dettes illégitimes.
Les expertises menaçantes sur l’avenir des banques se multiplient et mettent en cause, moins la politique accommodante de la Banque centrale européenne (BCE) que les banques elles-mêmes qui n’ont pas profité de la situation pour se réformer. Pour Christine Lagarde, c’est le défi majeur. Les banques sont en mauvaise posture à cause des taux bas, sauf que ça n’est pas si simple. Les experts sont certes de plus en plus nombreux à lancer des avertissements aux autorités monétaires. Parce qu’elles ne parviennent plus à gagner assez d’argent pour faire face aux nombreuses contraintes de régulation. Et parce que l’environnement international est morose et qu’un retournement conjoncturel pourrait précipiter la chute de certaines banques.
Le cabinet de conseil McKinsey annonce en outre dans son étude édifiante les suppressions de postes qui vont avec la faillite. Depuis le début de l’année, pas moins de dix banques européennes ont annoncé la suppression de 45 000 emplois. Ces diagnostics sont adressés directement à Christine Lagarde qui va prendre les commandes de la BCE dès le 1er novembre. Ce qui avait été une solution pour son prédécesseur Mario Draghi va devenir un problème pour elle.
L’ombre de la crise de 2008
La politique monétaire a été formidablement efficace pour éviter les effets induits par la crise financière de 2008. La BCE comme les autres a injecté des masses de liquidités pour éviter que le système économique se bloque et s’asphyxie, faute de carburant. La BCE qui était partie plus tard que les autres banques centrales, colle désormais à l’agenda de la Réserve fédérale américaine (Fed) et maintient sa politique de taux d’intérêt très bas. À tel point que Mario Draghi est désormais soupçonné de ne pas avoir changé de logiciel principalement pour soutenir les banques italiennes particulièrement fragiles. Ce faisant, il a aussi beaucoup fragilisé le système pour un résultat macro-économique assez décevant. Les résultats des banques publiés chaque semestre restent impressionnants, mais absolument pas révélateurs de ce que vit le secteur. En 2018, on a encore vu 7 milliards et demi d’euros de gain pour BNP Paribas, 4,4 milliards pour le Crédit Agricole et presque 4 milliards pour la Société Générale. Mais vu des investisseurs, c’est une autre bataille. En Bourse, sur l’année 2018, les actions bancaires du CAC40 ont toutes dévissé d’au moins 30 %. Les valeurs bancaires n’inspirent plus confiance à cause de trois points fondamentaux.
D’abord, parce que les recettes n’augmentent plus, le chiffre d’affaires, produit net bancaire, stagne. Le nerf de la guerre, pour une banque, c’est de vendre du crédit. La première source de recettes est la somme des intérêts perçus sur ces prêts. Évidemment, quand les taux sont de plus en plus bas, les intérêts ne font plus augmenter le chiffre d’affaires. Pour autant, il ne faut pas mettre ça sur le dos des banques qui accorderaient moins de crédit : aujourd’hui, la croissance de nouveaux crédits pour les entreprises et les ménages reste positive, située dans une fourchette de 5 à 8 %. Alors, aujourd’hui, pour la survie de leur chiffre d’affaire, les banques misent de plus en plus sur les commissions : tous les frais de garde et de tenue de compte oui, mais aussi la diversification vers le métier de bancassurance, qui consiste à vendre des assurances crédit. En revanche, de plus en plus de banques – BNP Paribas, Société Générale, Deutsche Bank – réduisent et recentrent leurs activités de marchés, qui peuvent être porteuses de plus ou moins values selon la conjoncture.
Modèle économique
Deuxième point, parce que leur modèle économique est trop lourd. Trop d’agence, de personnel, de coûts fixes. Et la popularité montante des fintechs, les néobanques comme Revolut ou N26 qui proposent des prestations bancaires gratuites ou à faible coût, tire vers le bas les grilles tarifaires de tout un secteur, pour un service au moins aussi bon. Donc à quoi bon posséder autant d’agences physiques ? Il y aura de la casse sociale dans le secteur. Cela demandera de se séparer d’une partie du personnel. Depuis 2011, en France, 18 000 postes dans le secteur bancaire ont été supprimés, soit exactement le nombre de départs chez Deutsche Bank annoncé en une seule fois début juillet. La vague est encore à venir.
Dernier point, peu de banques parviennent aujourd’hui à créer de la valeur, c’est-à-dire à créer plus d’argent que ce que l’argent leur coûte. Ce qu’il faut comprendre, c’est que, quand les taux baissent, l’exigence de rendement des fonds propres (ce qu’attendent les investisseurs) ne baissent pas. 80 % des établissements aujourd’hui détruisent de la valeur. Peut-on dire que cette situation ressort uniquement de la politique monétaire menée par la banque centrale ?
Quand on regarde les résultats de l’étude de McKinsey, la différence est criante. Si 37 % des établissements jugés « challengés », c’est-à-dire en grand danger, sont européens (et 55 % asiatiques), il n’y a aucun américain dans cette catégorie, ni même dans la catégorie du dessus, les banques dites « résilientes ». Tous les établissements américains se retrouvent dans les deux premières catégories. Explication : les taux d’intérêt ont été remontés en 2015 déjà et côtoient les 2 %. Résultat, les banques respirent un peu plus. La solution consisterait alors en une consolidation du secteur, encore plus forte que celle réalisée après crise. Et pourquoi pas une fusion européenne préconisée par la BCE. Pour faire face aux coûts d’abord.
Une banque mondiale consacre jusqu’à 88 millions de dollars par an à collecter et à stocker des informations sur ses clients. Une activité obligatoire voulue par la réglementation et qui ne lui apporte aucun avantage concurrentiel, répondant uniquement aux obligations réglementaires de lutte anti-blanchiment et de financement du terrorisme et d’identification des clients (Know Your Customer).