JEUDI 4 octobre, l’équipe d’experts de la Banque mondiale a eu une séance de travail avec les responsables du Projet de réforme et de rajeunissement de l’administration publique (PRRAP) à son siège au ministère de la Fonction publique. Il a été notamment question de faire « la revue de la mise en œuvre du plan d’action » de ce projet. Les experts de la Banque mondiale ont eu également des discussions sur « les objectifs de la mission et les attentes du CMU » à la représentation de l’institution de Bretton Woods à Kinshasa.
La délégation s’est rendue vendredi 5 octobre à la CTAD où elle a fait « un tour d’horizon sur la décentralisation administrative » avec ses responsables. Puis, elle s’est rendue au Service national de renforcement des capacités (SENAREC), au ministère du Plan pour faire « le point de ses activités ». Et enfin, la délégation est allée à la cellule financière du PRAPP pour s’enquérir de « l’exécution des recommandations de la dernière supervision financière et des audits internes et externes.
Ce lundi 8 octobre, il est prévu des séances de travail avec la directrice de la paie pour faire « le point sur la paie des Jeunes professionnels (JPO) », émoulus de l’École nationale d’administration (ENA) ; avec la directrice de la préparation du budget à propos de « la budgétisation 2019 des JPO et de la mise à la retraite » des fonctionnaires et agents de l’État ; et avec les responsables de la Cellule de passation des marchés PRAPP sur « l’état d’exécution du PPM 2018 ».
Mardi 9 octobre, les experts de la Banque mondiale seront reçus, tout d’abord, par Pierre Kangudia Mbayi, le ministre d’État et ministre du Budget, à son cabinet de travail. L’entretien portera sur « la relance des opérations de la mise à la retraite des fonctionnaires et agents de l’État, et sur la budgétisation des JPO ».
Ensuite, ils se rendront au cabinet du 1ER Ministre, la Primature, où il est prévu une séance de travail avec le directeur du cabinet adjoint en charge de la réforme de l’administration publique en vue de faire justement un état des lieux de cette réforme. Entre les deux audiences, ils auront une séance de travail à la représentation de la Banque mondiale autour du rapport de la revue organisationnelle.
Mercredi 10 octobre, c’est le tour de Henri Yav Mulang, le ministre des Finances, de recevoir en audience la mission de bonne gouvernance de la Banque mondiale. Il discutera avec les experts BM de « la relance des opérations de la mise à la retraite et la budgétisation des JPO ». Et une séance de travail dans la journée est prévue à l’ENA.
Enfin, le jeudi 10 octobre, les experts de la Banque mondiale seront les hôtes de Michel Bongongo Ikoli, le ministre d’État et ministre de la Fonction publique. Ensemble, ils vont évoquer « l’état d’exécution du plan d’action et la situation générale du projet » de réforme de l’administration publique qui bénéficie du soutien de la Banque mondiale.
État des lieux
Selon le ministre d’État Bongongo, la réforme et la modernisation de la Fonction publique sont « le passage obligé » vers l’émergence d’une administration publique véritablement au service du développement durable. C’est donc un processus sur le long terme, qui a pour objectif global de « rendre les services publics sensibles au besoin des citoyens et aux enjeux de développement du pays ». Pour cela, le gouvernement s’est doté d’un cadre stratégique de la réforme et de la modernisation de l’administration publique.
À ce jour, l’administration publique en République démocratique du Congo est encore affaiblie par des décennies de mauvaise gestion et d’instabilité dans le pays. Des pratiques éhontées de gouvernance d’un autre âge sont à l’origine de la débâcle de l’État et de ses institutions…
Les ressources humaines sont les plus affectées par la « crise de la Fonction publique ». La démotivation s’est généralisée dans les rangs des agents et des fonctionnaires à cause notamment des salaires de misère ; de l’absence de sécurité sociale et de couverture médicale ; de mauvaises conditions de travail déplorables ; du délabrement des bâtiments ainsi que de la vétusté des équipements et du matériel…
Les textes légaux et réglementaires sur le recrutement et l’avancement en grade ne sont pas respectés, tandis que la formation et le perfectionnement du personnel sont négligés. En outre, il y a pléthore des effectifs des fonctionnaires et agents de l’État.
Sur le plan organisationnel et managérial, la Fonction publique ne se repose plus sur les modes formels de gestion, ni sur des manuels de procédures ni sur tout document de travail facilitant la formalisation des comportements. Les structures sont devenues complexes et fortement centralisées. En cas de défaillance, on recourt souvent à des structures ad hoc, lesquelles malheureusement empiétaient sur les attributions des structures fonctionnelles.
Par ailleurs, les cadres organiques agréés, quand ils en existent, ne sont pas mis à jour et sont en déphasage avec les missions assignées au service public, lesquelles sont parfois dépassées et ne s’adaptent plus aux exigences de la modernisation.
En dehors du système déficient de gestion des ressources humaines et de la carrière, de la lourdeur des procédures et de la lenteur dans la prise de décisions, il y a d’autres dysfonctionnements, tels que l’absence de régime de protection sociale efficace, de missions clairement définies ; le chevauchement des compétences et des structures dans les ministères ; le déficit d’éthique professionnelle. D’autre part, il y a l’absence de normes de qualité et d’efficacité du système de contrôle, d’évaluation et de sanctions ; la mauvaise qualité des services offerts aux usagers ; un système d’information et de communication interne et externe peu efficace.
Les réformes antérieures
L’État a tenté d’améliorer l’efficacité de son administration, à travers quatre grandes réformes en 1965, 1972, 1981 et 2003. Aucune d’elles n’a été totalement couronnée de succès.
Parmi les raisons de l’échec : l’absence de concertation et d’implication des fonctionnaires, pourtant premiers bénéficiaires des retombées de la réforme, mais aussi des syndicats et de la société civile ; le manque de consensus entre le gouvernement et les partenaires techniques et financiers (PTF) dans le choix des stratégies de réforme ; la substitution des unités de gestion des projets ou programmes publics à financements extérieurs aux administrations, structures pérennes de gestion et d’implantation de la réforme.
Il y a aussi le manque de mécanisme souple et efficace de pilotage et de coordination des actions de la réforme ; la non implication des acteurs concernés ; le non alignement du financement des PTF aux programmes nationaux ; le choix d’une intervention thématique, sectorielle et partielle au lieu d’une réponse globale et inclusive ; le ciblage souvent au mauvais endroit et en dehors de l’administration.
Pour gagner le pari de la réforme, des experts pensent qu’il faut l’unité de commandement et de pilotage, une structure de gestion et de cadrage juridique non fragmentée, un système fort de gestion des ressources humaines, un système de paie adapté et cohérent, et une Fonction publique rajeunie.