Ex-Albert, le Virunga est l’un des tout premiers et plus grands parcs africains. Il a une superficie de 7 800 km², soit près du tiers du territoire rwandais. Wenzyslas, le conservateur communautaire du parc national des Virunga s’en félicite.
« Nous notons aujourd’hui moins de plaintes des paysans riverains depuis que la clôture électrique est en train d’être érigée autour du parc des Virunga… déjà à quelques mètres avant d’atteindre le fil électrifié, les animaux sont du coup électrocutés et ne savent plus franchir les limites du parc pour dévaster les cultures des riverains comme avant », a-t-il fait savoir à la presse locale. Et de poursuivre : « La clôture de séparation électrique a le mérite d’éviter des conflits entre l’Institut congolais de la conservation de la nature (ICCN) et les paysans riverains du Virunga. Non seulement les animaux du parc sont contraints de rester dans leur habitat naturel, mais également les hommes n’ont plus accès facile à l’intérieur du parc pour le détruire ».
Une précision de taille. Le courant étant alternatif, les animaux ne courent, à l’extrême, que le risque d’une électrocution passagère et dissuasive. Il semble que dans la région, le projet est très bien porté dans l’opinion et des jeunes assurent la main-d’œuvre. Dans le secteur sud du parc, où les premiers essais du courant ont été effectués, les résultats sont plutôt concluants d’après Jérôme Tanzi, membre du cadre de concertation dans le paysage Virunga (CACOPVI). Au niveau de Mikeno, le comité local de développement et de conservation (CLDC-Bwisha) rapporte de moins en moins des cas de prédation des cultures. Les rapports entre les pasteurs, les agriculteurs bordiers du parc et les gardiens de la réserve devenaient davantage sulfureux. L’an dernier, une armée d’éléphants et de buffles avait opéré une véritable ratonnade à Ishasha, apprend-on. Et l’ICCN n’aurait pas tenu ses promesses d’indemnisation des cultures ravagées par les pachydermes.
Les vichystes de Kivu
Il appert que le projet de clôture électrique fait des émules même dans l’élite kivutienne. Voilà pratiquement 25 ans que le Grand-Kivu vit dans une instabilité endémique dont les causes sont plutôt exogènes… venues d’ailleurs, fulmine ce jeune ingénieur dans le bâtiment. L’allusion au Rwanda ne fait l’ombre d’aucun doute. Stratagème sournoisement fomenté par les voisins, le climat sécuritaire est devenu si volatil qu’il a impacté celui des affaires, fait-il comprendre, avant de poursuivre : « Aujourd’hui, à Goma, les affaires qui prospèrent sont celles ayant un lien avec les banques, les assureurs, les négociants rwandais… Nous sommes à l’époque de businessmen collabos. Le gros de leur épargne loge au Rwanda… Eux-mêmes bien souvent ».
Naguère objet de tâtonnement et de conflit permanent, la frontière entre la RDC et le Rwanda est actuellement clairement établie avec des bornes et un no man’s land. « Cela ne suffit pas. Il faut un mur… électrique pour se sécuriser mutuellement », estime le jeune ingénieur. Pour qui, le projet du président américain Donald Trump de construire un mur entre les États-Unis et le Mexique à coût de 25 milliards de dollars (plus de trois fois le budget de la RDC) ferait jurisprudence dans les relations internationales.
« Construire un mur sur sa frontière fait dorénavant partie de l’arsenal des garanties sécuritaires internationales dont peut se prévaloir un État. La RDC en a aussi le plein droit », explique-t-il. Lors de la campagne électorale pour les présidentielles de 2006, Nzanga Mobutu s’était déclaré favorable à l’érection d’un mur entre la RDC et le Rwanda.