Alter prévoit des créations d’emplois moins nombreuses en 2017 et 2018

Les projections de ce centre d’études stratégiques se fondent notamment sur celles de plusieurs organismes et économistes, qui ont légèrement revu à la hausse leurs prévisions faute d’anticipation de la part du gouvernement.

Selon le centre d’études stratégiques Alter, sur l’ensemble de l’année 2017, les créations d’emplois privés seraient moins nombreuses : moins de 50 000 emplois. En 2018, l’organisme prévoit que le nombre de chômeurs par an continuerait d’augmenter, se situant à un demi-million de demandeurs d’emploi sans activité supplémentaires. Explication : tout politique d’emploi comporte deux volets, l’offre et la demande. Actuellement, selon plusieurs sources officielles et non officielles recoupées, la population active en République démocratique du Congo est estimée à quelque 50 millions de personnes. Chaque année, on estime environ 400 000 nouveaux demandeurs d’emplois.

Alter souligne que la plupart des Congolais au chômage cherchent activement un emploi et d’autres sont des « actifs découragés », la formule consacrée pour les chômeurs qui ont renoncé à rechercher un emploi. Les 20-40 ans sont de loin la catégorie d’âge la plus touchée, avec 54,2 % de la population active sans emploi. L’étude du marché du travail que compte publier ce centre au mois de mai, sera réalisée tous les trois mois. Il fait ressortir que les femmes ont actuellement plus de chances de trouver un emploi que les hommes, non pas en raison du genre ou de niveau de qualification.

Selon l’étude à paraître d’Alter, la hausse du chômage s’explique en partie par des licenciements dans les secteurs minier, manufacturier et des services. Après avoir enregistré des taux de croissance proches de 8 % entre 2009 et 2014, l’économie congolaise tourne au ralenti, en raison notamment de la chute des cours des matières premières et de quelques mouvements sociaux dans des secteurs stratégiques comme les mines et l’industrie. Selon les projections du Fonds monétaire international (FMI), le taux de croissance économique moyen de l’Afrique subsaharienne devrait tomber à 1.4 % en 2016, niveau inférieur à la moitié de celui de l’année précédente et très loin des 5 % enregistrés sur la période 2010-2014. Toujours selon le FMI, il ne devrait pas dépasser 3 % cette année.

Une vraie politique d’anticipation

Les chercheurs d’Alter précisent que si l’économie ne prospère pas, il y aura moins de créations d’emplois. Et s’il n’y a pas de politique de l’emploi anticipative, mêmes les quelques emplois qui seront créés n’auront pas d’impact significatif sur la demande. Ces chercheurs sont d’accord avec les experts qui préconisent que l’accent soit mis et sur la croissance et sur la formation. La formation à elle seule, ne suffira pas pour régler le problème d’emploi. De nouvelles entreprises ne pourront voir le jour que s’il y a une forte croissance économique ; laquelle permettra par ailleurs aux entreprises existantes de pouvoir générer du profit, d’accroître leurs activités et de créer de nouveaux emplois.

Le débat se corse sur le concept chômeur. Aujourd’hui, tout celui qui s’adonne à une activité rémunératrice n’est pas considéré comme chômeur. Par exemple, la vendeuse de beignets ou de pains, la commerçante qui fait des navettes, le vendeur de journaux… D’où la difficulté d’établir des statistiques fiables. Il est temps qu’au niveau national, l’on tienne des registres actualisés dans tous domaines, secteur par secteur, notamment en matière d’emploi ou de chômage. Personne ne sait dire aujourd’hui combien d’entreprises fonctionnent au pays, combien ont mis la clé sous le paillasson, combien continuent à embaucher et où… Les statistiques sont donc une question cruciale pour le développement d’un pays, expliquent les chercheurs d’Alter. Dans le secteur de l’emploi, malheureusement, l’Office national de l’emploi (ONEM) qui est l’organe technique du gouvernement, n’a pas les moyens (humains, techniques et financiers) qu’il faut pour centraliser toutes les données sur l’emploi. Il ne joue pas son rôle capital de mener des réflexions et proposer les pistes de solutions adéquates.

Qui crée les emplois ?

Actuellement, ce sont les secteurs des télécommunications et des banques qui sont pourvoyeurs d’emplois, mais très limités car ils utilisent plus les technologies nouvelles. Avec la libéralisation du secteur des assurances, on s’attend aussi à ce que de nouveaux emplois soient crées en masse. La plupart des secteurs qu’on avait connus comme étant les piliers de l’économie, sont dans les difficultés. C’est notamment le cas du secteur minier et de l’agriculture. Dans tous les cas, tout est opportunité d’affaires en RDC, donc d’emplois. C’est ici que la formation a tout son pesant d’or. De nouvelles filières exigent des qualifications appropriées. Les jeunes devraient apprendre à faire des choix des formations en fonction de secteurs porteurs d’avenir et de besoins du marché du travail ou qui leur permettront de se lancer facilement dans l’entreprenariat.