PROPOS RECUEILLIS PAR TONY NGANGA
Les échanges d’amabilités ont inévitablement détendu le début de notre entretien réalisé au téléphone. On sentait la détermination et la sérénité dans les propos de Marius Mihigo. Affaire AVZ, accusations de corruption, trafic d’influence, conflit d’intérêt, ses rapports avec le président Tshisekedi et son entourage. Nous voulions l’interviewer pour mieux comprendre.
Dès le début de notre entretien, nous avons plongé, en le prévenant que nos questions n’allaient pas lui plaire, parce qu’il les trouverait directes, parfois agressives. « Je répondrai à toutes vos questions. » Il a tenu parole. Il a répondu directement, habilement mais sans jamais chercher de faux-fuyants.
Depuis Washington, DC, aux États-Unis, Marius Mihigo nous a déclaré que s’il a décidé de s’en remettre à une décision de justice, « c’est avant tout une question de réputation et de probité ». Il se dit « prêt à se battre pour son honneur ». Il a déjà instruit ses avocats de porter plainte « en bonne et due forme pour diffamation ».
Le parcours du combattant
Marius Mushagalusa Mihigo Ngalamulume dit <Marius Mihigo>, diplômé en Relations Internationales du CEDS de Paris, titulaire d’un Executive MBA en Management des Agences de Renseignement et de Sécurité du CF2R (Centre Français de Recherche sur le Renseignement) et ancien Auditeur des programmes de négociation des universités de Harvard aux USA et d’Oxford en Angleterre. Consultant international en activité depuis 1993, spécialisé dans les négociations, l’intelligence économique et la facilitation d’affaires internationales. Il a été envoyé spécial de plusieurs chefs d’Etat et de Gouvernement, conseiller spécial et administrateur dans plusieurs organisations non étatiques ainsi que bénévole auprès de plusieurs œuvres caritatives.
Business et Finances : Comment avez-vous réagi à l’article d’Australian Financial Review, et relayé par d’autres médias sur le prétendu montant de 6 millions de dollars à vous payer par AVZ ?
Marius M. Mihigo : C’est du racisme, tout simplement. Pour ce journaliste là (Tom Richardson d’AFR) et d’autres, quand un Africain perçoit des honoraires en millions de dollars, cela veut dire qu’il va utiliser une partie de sa rémunération pour corrompre les agents de l’État ou les autorités du pays. Pensez-vous vraiment que si c’était un Blanc qui percevait des millions de dollarspour ses prestations, ces gens parleraient de pots-de-vin ? Du reste il ne s’agit pas de 6 millions mais d’un million de dollars et de remboursement de frais divers payés non pas en cash mais directement par virement.
BEF : Ces accusations hypothèquent, certes, votre réputation et celle d’AVZ, mais elles pourrissent aussi le climat des affaires dans le pays…
MMM : Ma réputation et celle d’AVZ restent intactes. En ce qui me concerne, j’ai défendu les intérêts de plus de 20 multinationales ces deux dernières décennies dans le strict respect du Foreign Corrupt Practices Act (FCPA). Pour ce qui concerne le climat des affaires, j’imagine que les motivations racistes de M. Richardson le pousse à vouloir jeter également un discrédit sur la RDC.
BEF : Pourquoi, à votre avis, on s’attaque à AVZ ?
MMM : Les attaques contre AVZ font partie d’une campagne de diffamation destinée à détruire la réputation d’AVZ auprès du chef de l’Etat dans le but d’emmener le Président Tshisekedi à ordonner qu’AVZ soit chassé de la RDC.
BEF : Naturellement, AVZ s’oppose à la démarche de la ministre des mines… Qu’adviendrait-il si la société portait le litige devant une cour arbitrale ?
MMM : Il va de soi que dans l’hypothèse d’un arbitrage international, la RDC partirait perdante. Mais on n’en n’est pas encore là.
BEF : Quel est l’état de la situation dans l’affaire AVZ ?
MMM : Actuellement AVZ est sereine car ayant respecté tous ses engagements et ayant saisi la plus haute hiérarchie du pays en vue de rentrer dans ses droits en tant qu’investisseur.
AVZ est également heureuse que les 221 carrés miniers soient rentrés dans le patrimoine de Dathcom Mining SA dont AVZ demeure actionnaire majoritaire. Il est souhaitable que la Ministre des Mines prenne une décision modificative incluant les 221 carrés miniers, octroie le permis d’exploitation à Dathcom Mining SA et que notification soit faite en vue de démarrer le projet.
BEF : Quelle est la position actuelle du géant minier australien et qu’est-ce qu’il attend de l’État ?
MMM : Que l’état protège AVZ conformément à la constitution, au code minier, établisse un cadre de concertation gagnant gagnant, et lui permette de réaliser le financement du projet.
BEF : Pensez-vous que derrière la campagne médiatique anti-AVZ, il y a des gens qui veulent vous régler des comptes politiquement ?
MMM : Oui, certainement. Il est évident que mon parcours dérange certaines personnes.
BEF : Quels sont vos rapports avec le président Tshisekedi ?
MMM : Ma relation avec le chef de l’État ne date pas d’aujourd’hui. J’ai milité au sein de l’UDPS depuis 1990. J’ai servi officiellement le chef de l’Etat du 1er Juillet 2020 au 28 Février 2021 comme expert à la cellule politique, défense et sécurité du conseil présidentiel de veille stratégique avec rang de conseiller du Président de la République. Depuis mon départ de la présidence, je n’entretiens pas de relations particulières avec le Président. Je garde pour le Président Tshisekedi une profonde admiration et éprouve un grand respect pour le travail qu’il accomplit pour notre nation.
BEF : On a vu le président Tshisekedi se débarrasser des proches collaborateurs trempés jusqu’au cou dans des affaires de corruption et de pots-de-vin… Ne craignez-vous pas que cela ne vous arrive aussi ?
MMM : Je ne suis impliqué dans aucune forme de malversation et je ne suis pas membre du cabinet présidentiel. Je ne suis donc pas concerné par la purge dont il est question.