La RDC et le FMI d’accord pour un programme de référence semestriel

L’annonce a été faite, mardi 26 décembre, à l’issue de la réunion hebdomadaire du Comité de conjoncture économique présidée par le 1ER Ministre à la Primature. Le vice-ministre aux Finances a informé les membres permanents de ce comité que ce programme, de décembre 2019 à mai 2020, devrait logiquement aboutir à une facilité des crédits rapides de 368 millions des dollars.

SYLVESTRE Ilunga Ilunkamba, le 1ER Ministre, tient à rester en phase avec le Fonds monétaire international (FMI). Pour encadrer ce programme de référence, des mesures sont préconisées. Au cours de leur réunion de la semaine dernière, les membres permanents du Comité de conjoncture économique du gouvernement ont été informés par Junior Mata, le vice-ministre aux Finances, de l’état de la coopération entre la République démocratique du Congo et le FMI. 

Il a indiqué que « les discussions à ce sujet ont abouti à un accord sur la mise en œuvre d’un programme de référence qui va s’échelonner sur six mois », c’est-à-dire de décembre 2019 à mai 2020. Et que ce programme va aboutir à une facilité des crédits rapides de 368 millions des dollars. 

Les observateurs sont à peu près d’accord qu’un programme avec le FMI donnerait au chef de l’État et à son gouvernement une marge de manœuvre suffisante. L’avis favorable du conseil d’administration du FMI sur le rapport des missions de ses experts en RDC était attendu avec impatience à Kinshasa. Il est tombé, le 26 août. En effet, le conseil d’administration du FMI s’est réuni pour se pencher sur les consultations pour l’année 2019 avec la RDC au titre de l’article IV des statuts du FMI.

Rappelons que conformément aux dispositions de cet article, le Fonds procède, habituellement chaque année, à des consultations bilatérales avec ses membres. 

Une mission des services du FMI se rend dans le pays, recueille des données économiques et financières, et s’entretient avec les responsables nationaux de l’évolution et des politiques économiques du pays. De retour au siège, les membres de la mission rédigent un rapport qui sert de cadre aux délibérations du conseil d’administration. 

Situation dans le pays

C’est ce qui a été fait. Grosso modo, les administrateurs ont félicité les autorités de la RDC d’avoir « mené une politique macroéconomique prudente » qui a contribué à « réduire l’inflation et à stimuler une reprise après la chute des prix à l’exportation en 2016-2017 ». 

Selon le tableau dressé par les experts du FMI, la RDC qui n’était plus en programme avec l’institution de Bretton Woods depuis 2015, est « confrontée à des problèmes de développement considérables en dépit de sa richesse en ressources naturelles. Le pays fait face actuellement à sa plus grande flambée de l’épidémie de maladie à virus Ébola ». On notera utilement : « La transition politique pacifique qui s’est déroulée plus tôt dans l’année, la première de l’histoire du pays, offre une occasion de procéder à des réformes pour réduire la pauvreté omniprésente, créer des emplois et promouvoir une croissance inclusive. Une politique macroéconomique prudente a contribué à une reprise après la baisse des prix à l’exportation en 2016-2017. Il est essentiel de consolider ces gains pour aller de l’avant ». 

Statistiquement parlant, la situation se présente comme suit : la croissance du PIB réel a atteint 5,8 % en 2018, portée par la hausse des prix et de la production du cuivre et du cobalt. L’inflation est tombée à 7,2 % et le franc congolais s’est déprécié de 2 % seulement en 2018. Un faible excédent budgétaire de 0,4 % du PIB a été enregistré, grâce à la vigueur des prix à l’exportation et à l’augmentation du volume des exportations, ainsi qu’au relèvement des taux d’imposition appliqués aux exportations minières au titre du code minier révisé 2018. Les réserves de change de la Banque centrale sont montées à 2,6 semaines d’importations. D’autre part, le déficit des transactions extérieures courantes s’est creusé pour atteindre 4,6 % du PIB.   

Le pronostic

En se projetant dans l’avenir, la croissance du PIB devrait fléchir à 4,3 % en 2019, du fait de la baisse des prix du cuivre et du cobalt après les pics enregistrés en 2018. Un déficit budgétaire de 0,2 % du PIB est attendu, car les recettes minières devraient être plus faibles qu’en 2018. Le déficit courant devrait tomber à 3,5 % du PIB, et les réserves de change de la Banque centrale devraient monter à 3,7 semaines d’importations. 

Sur la base des politiques actuelles, les recettes resteront bien en deçà de la moyenne des pays d’Afrique subsaharienne en dépit de l’impact positif du nouveau code minier. La prolifération des taxes et des institutions chargées de l’impôt, l’étendue des exonérations fiscales, l’étroitesse de l’assiette de l’impôt ainsi que des frontières longues et poreuses en sont les raisons. Les chiffres effectifs ont eu tendance à s’écarter largement des projections budgétaires, ce qui nuit à la crédibilité du processus budgétaire et de la surveillance par le Parlement. Les procédures de dépenses d’urgence ont été largement utilisées, et des arriérés intérieurs importants ont été accumulés. 

Quant à la politique monétaire, elle a été entravée par la forte dollarisation. Une nouvelle loi sur la Banque centrale a été promulguée en 2018 afin de renforcer son indépendance, d’accroître son capital et de renforcer sa capacité à surveiller le système financier. 

La transparence et la responsabilisation de la gestion des ressources naturelles constituent des enjeux majeurs pour le pays. Un décret de 2011 prévoyant que l’État publie tous les contrats relatifs à l’industrie minière, au pétrole et à la sylviculture n’a pas été totalement appliqué. Les états financiers audités de certaines entreprises publiques ne sont pas publiés. Le FMI mènera une mission d’évaluation de la gouvernance en octobre. Par ailleurs, le climat des affaires reste difficile en raison d’un large éventail de facteurs, notamment la complexité de la fiscalité et la vulnérabilité judiciaire. Les coûts de production sont élevés en raison de l’insuffisance des infrastructures. 

Les administrateurs du Fonds ont noté que « la RDC a besoin d’aide de la communauté internationale des bailleurs de fonds et d’une assistance pour renforcer ses capacités ». 

Pour eux, « il est impératif d’accroître les recettes intérieures afin de financer les besoins de développement et sociaux urgents ». Pour cela, ils ont recommandé de « réduire les exonérations, d’élargir l’assiette de l’impôt, de simplifier le système fiscal et d’améliorer l’administration de l’impôt et le contrôle aux frontières ». Ils ont encouragé aussi les autorités à « continuer d’intégrer plus largement les recettes minières dans la comptabilité du Trésor ». D’après eux, « il est (également) nécessaire d’améliorer la gestion des finances publiques et l’efficience des dépenses publiques ». Tout comme « il est essentiel d’établir des projections réalistes pour les recettes et les dépenses afin d’améliorer la crédibilité du processus budgétaire ». Dès lors, « le rétablissement de la chaîne de la dépense et la limitation de l’usage des procédures de dépenses d’urgence favoriseraient la transparence et la responsabilisation ». 

Amélioration

Par ailleurs, « une rationalisation de la Fonction publique et une amélioration de la rémunération en accroîtraient l’efficience ». Pour préserver la viabilité de la dette, « il est nécessaire de bien évaluer les projets d’investissements publics, d’éviter les emprunts coûteux et les prêts garantis, ainsi que d’établir une stratégie d’apurement des arriérés intérieurs ». Il va de soi qu’« une amélioration du cadre de politique monétaire en accroîtrait l’efficacité ». C’est pourquoi les administrateurs du Fonds engagent la Banque centrale à « accroître ses réserves de change afin qu’elle puisse intervenir pour stabiliser le marché si nécessaire ». « Une recapitalisation de la Banque centrale renforcerait son indépendance et rehausserait sa capacité de mener la politique monétaire et de promouvoir la stabilité financière ». 

Dans la foulée, « il est important d’améliorer la réglementation afin de protéger et de développer le système financier ». Dans ce contexte, ils proposent d’« aligner le projet de loi bancaire sur les normes internationales ». Et pour améliorer le dispositif de lutte contre le blanchiment de capitaux et le financement du terrorisme, les autorités du pays doivent « mettre en œuvre les mesures préalables » qui figureront dans le rapport d’évaluation du groupe d’action contre le blanchiment d’argent en Afrique centrale. Pour les administrateurs, « la promotion de la microfinance favoriserait une croissance inclusive et l’inclusion financière ». 

Enfin, « il est crucial de combattre la corruption et de renforcer la gouvernance pour accroître l’efficience des dépenses publiques et améliorer les perspectives de croissance ». Pour accroître la transparence et la responsabilisation dans la gestion des ressources naturelles, ils appellent à « lancer des appels d’offres pour les actifs miniers, à publier tous les contrats miniers, à divulguer la véritable propriété des parties contractuelles et à publier les états financiers audités des entreprises publiques ». Les administrateurs du Fonds engagent aussi les autorités du pays à « promulguer promptement la loi de lutte contre la corruption et la loi portant création d’une commission indépendante de lutte contre la corruption ».