L’Afrique importe de plus en plus de la Chine et de l’Asie du Sud-Est au détriment de l’Europe

Des nouvelles lignes maritimes conteneurisées desservent l’Afrique désormais de cette partie du monde à travers le Cap de Bonne Esperance en Afrique du Sud sans passer par l’Europe. La desserte de l’Afrique du Nord passe par l’océan Indien, la Méditerranée, le détroit de Gibraltar et le canal de Suez.

TOUTES ces lignes sont assurées par des armements, tels que Maersk, Line/Saf Marine, CMA, CGM/Delmas et MSC qui ont des succursales ou filiales en République démocratique du Congo, notamment à Boma, Matadi et Kinshasa. Ainsi, un commerçant en déplacement en Chine peut faire conteneuriser ses marchandises et confier son conteneur à Guangzhou à un transporteur maritime pour son acheminement, d’abord par voie maritime, jusqu’à un port africain et de là, le conteneur pourra continuer par chemin de fer ou par route jusqu’à la cité du commerçant à l’intérieur du pays. Au besoin, le même conteneur pourrait éventuellement continuer son voyage par voie fluviale jusqu’à sa destination finale. Tous ces segments de transport se font sous la responsabilité d’un seul opérateur car le fret perçu au départ inclue la livraison porte à porte. 

L’Afrique importe de plus en plus à partir de la Chine et de l’Asie du Sud-Est au détriment de l’Europe. Des nouvelles lignes maritimes conteneurisées desservent l’Afrique à partir de la Chine et de l’Asie du SE à travers le Cap de Bonne Esperance en Afrique du Sud. La desserte de l’Afrique du Nord à partir de l’Asie se fait à travers l’océan Indien puis la méditerranée et le détroit de Gibraltar via la mer rouge et le canal de Suez. Les armements qui ont des succursales en RDC assurent le trafic transocéanique (Maersk, Line/Saf Marine, CMA, CGM/Delmas et MSC) et le feedering interafricain pour Nile Dutch et PIL. Le feeder est un navire de petite taille qui distribue les conteneurs dans les ports de la sous-région à partir d’un hub. PIL (Pacific International Line) s’occupe souvent de la distribution des conteneurs vers l’Afrique de l’Ouest à partir du hub de Durban ou Cape Town. De même il récupère tous les conteneurs de la RDC à Pointe-Noire et les achemine à Matadi. Il en suit que les navires transporteurs sont de plus en plus construits avec des capacités de plus en plus grandes afin de réaliser des profits importants liés à l’économie d’échelle. 

Par exemple, le géant danois Maersk Line, n°1 mondial dans la conteneurisation a commandé 11 Ultra-Large Container Vessels (ULCV) ayant chacun une capacité de 19 630 EVP (équivalent 20 pieds) avec une longueur approximative de 400 m, une largeur de 58,6 m et un tirant d’eau de 16,5 m. Ces navires sont construits par Daewoo Shipbuilding & Marine Engineering (DSME) pour un montant de 1,8 milliard de dollars. Dans ce contexte concurrentiel et, par souci de l’environnement, l’utilisation du gaz naturel liquéfié comme carburant est en hausse. 

En effet, les navires qui fonctionnent au gaz naturel liquéfié sont moins émetteurs de certaines substances nocives et peuvent donc être un moyen rentable de respecter les nouvelles règles sur le contrôle des émissions. 

Les navires utilisant du gaz naturel liquéfié représentent, en tonnage brut, 13,5 % des livres de commande pour 2018 et les années suivantes, soit plus du double de la valeur enregistrée en 2017 et plus du triple de sa valeur de 2015. L’État a laissé miroiter une mobilisation de 35 millions de dollars pour doter les Lignes maritimes congolaises (LMC) d’un navire en propre. Rien n’est venu, voilà pratiquement 8 ans. 

Dumping

L’autre enjeu mondial porte sur la concurrence féroce entre les différents armements transporteurs qui n’hésitent pas à « casser les prix », d’où la baisse des taux de fret. Les plus faibles et les moins organisés disparaissent ou font faillite et laissent la place aux géants de la conteneurisation. 

La bataille de la mer se gagne désormais sur terre car l’organisation d’une logistique compétitive à travers les terminaux à conteneurs dans les ports et à l’intérieur devient la clé du succès. Les transporteurs maritimes se lancent dans la gestion des terminaux à conteneurs afin de mieux en contrôler les flux. Les terminaux à travers le monde sont donc rachetés ou loués à longue durée par ces opérateurs qui n’hésitent pas à financer des projets de construction des routes, des ponts et autres infrastructures permettant l’évacuation des conteneurs vers l’arrière-pays. Une guerre sans nom s’installe lentement mais sûrement dans le paysage économique mondial. C’est la guerre du fret, disent certains. Non, c’est la troisième guerre mondiale, renchérissent les autres. 

L’Afrique ayant évolué pendant très longtemps en marge de la conteneurisation est aujourd’hui très courtisée par les géants de la conteneurisation qui monopolisent le trafic des conteneurs vers l’Afrique et qui y construisent des nouveaux terminaux afin de mieux asseoir leur suprématie dans ce secteur. 

Les pays Africains ne pouvant financer seuls ces investissements afin de répondre à toutes ces exigences sont donc contraints de faire exploiter leurs terminaux par des groupes dérivant des géants de la conteneurisation. 

Les bénéfices récoltés de l’encaissement des frets de conteneurs vers l’Afrique et aussi de la gestion de leurs terminaux reviennent aux géants de la conteneurisation. Les concessions des terminaux à conteneurs africains sont bradées à vil prix sur base de location à longue durée (15 ans, 20 ans, 25 ans…). La flotte marchande africaine est d’ailleurs inexistante depuis la faillite des armements africains… 

Encore un vide comblé par les géants de la conteneurisation, écrit Gabriel Mukunda, qui cite notamment le danois Maersk Sealand, l’italo-suisse MSC, le français CMA-CGM, le taïwanais Evergreen Line, l’allemand Hapag Lloyd, le singapourien APL, les chinois COSCO et CSCL, le japonais NYK Line ou encore le sud-coréen Hanjin. La stratégie de ces géants pour gagner le monopole de transport en écrasant la concurrence reste la même : proposer toujours des taux de fret maritime très bas année après année en jouant sur l’économie d’échelle et en ayant la maîtrise de la chaîne logistique du pré-acheminement (pré-carriage) et du post-acheminement terrestre (on-forwarding) des conteneurs afin de réaliser le « porte à porte ». En d’autres termes, l’option de la RDC de relever le taux de perception de la taxe sur les trafics maritimes ne paraît guère judicieuse. La tendance aujourd’hui dans la conteneurisation est de transporter un grand nombre de conteneurs à la fois. C’est l’économie d’échelle: le coût de transport par unité transportée baisse au fur et à mesure que le nombre d’unités augmente. En d’autres mots, il est plus avantageux de transporter plusieurs conteneurs que peu.

Ainsi sonne le glas pour les LMC

En République du Congo, le port de Pointe-Noire dispose d’un terminal conteneurs exploité par Bolloré (CMA-CGM). C’est donc normal que Pointe-Noire constitue un hub pour CMA-CGM. Les conteneurs destinés à la RDC (Matadi) sont de plus en plus débarqués à Pointe-Noire pour être acheminés par feeder à Matadi. PIL tire profit de ce trafic car il aligne ses feeders sur la ligne exclusive Pointe-Noire-Matadi.

Avec l’érection prochaine du pont route/rail Kinshasa-Brazzaville, le trafic des conteneurs de la RDC via Matadi risque simplement de disparaître car le coût du tronçon routier Pointe-Noire-Brazzaville-Kinshasa devrait être plus compétitif que la navigation des PC sur le bief maritime jusqu’à Matadi. Le manque d’infrastructures appropriées au port de Matadi et le coût/risque excessif de la route Matadi-Kinshasa devraient faire pencher la balance au profit de Pointe-Noire. 

À moins que les autorités de la RDC ne relancent simultanément les projets de construction d’un port en eau profonde à Banana et de la route Banana-Matadi afin de faire jonction avec la route existante Matadi-Kinshasa. Par ailleurs, il sied de noter que le commerce maritime a progressé de 2,6 % pour atteindre 10,3 milliards de tonnes, mais cette progression est restée inférieure à la moyenne historique de 3 %. 

Et la demande de transport maritime est demeurée inférieure à l’offre, lit-on dans un nouveau rapport de l’ONU. En 2017, le taux de croissance devrait être légèrement supérieur (2,8 %) et, à moyen terme, le taux de croissance annuel composé devrait s’élever à 3,2 % pour la période comprise entre 2017 et 2022.