Les banques britanniques ferment à tour de bras leurs agences

ça ressemble à une déferlante : près de 2 375 bureaux ont été fermés depuis 2015 ou sont en passe de l’être. Plus de 625 d’entre eux devraient baisser le rideau de fer cette année. Le mouvement est général, mondialisation oblige.

 

Les banques anglaises auraient-elles décidé de se passer de leurs agences ? Leurs réseaux physiques fondent en tout cas comme neige au soleil. Royal Bank of Scotland (RBS) et Lloyds Banking Group ont annoncé ces derniers jours deux nouveaux plans de restructurations : le premier a prévenu qu’il fermerait 162 agences de plus que les 259 déjà condamnées depuis décembre 2017 quand le second a ajouté 49 fermetures aux 49 déjà programmées en fin d’année dernière.

Mais le mouvement est général. 

Selon l’association des consommateurs Which ?, ce sont 1 807 agences qui ont été fermées outre-Manche depuis 2015. Avec un rythme qui s’accélère : après 459 en 2015 et 584 en 2016, elles ont été 703 en 2017. Et  d’après le décompte réalisé à début mai, au moins 628 autres devraient baisser le rideau cette année – une soixantaine d’entre elles a déjà fermé. Soit, au total, 2 374 fermetures !

En cause : la banque en ligne

À chaque fois, la même raison est invoquée : la montée en puissance de la banque en ligne. « Depuis 2014, les transactions conduites au travers du réseau RBS en Angleterre et au Pays de Galles ont chuté de 30 %. Durant la même période, nous avons enregistré une croissance de 53 % du nombre de clients utilisant la banque mobile et le volume de transactions par téléphone a crû de 74 % », a déclaré un porte-parole. Même son de cloche chez Lloyds ou chez Barclays, qui a fermé plus de 121 agences depuis août 2016. Idem chez HSBC, qui a renoncé à 222 agences en 2016, et où l’on explique que le nombre des face-à-face avec des clients a fondu de près de moitié en cinq ans. 93 % des contacts se font désormais par téléphone fixe, Internet ou smartphone.

Digitalisation à marche forcée. Le rythme de fermeture est si soutenu (1 000 chez RBS depuis la fin 2014, faisant tomber le nombre d’agences, en dix ans, de près de 2 300 à seulement 849) que certains se demandent néanmoins si les banques ne provoquent pas elles-mêmes le mouvement. Il leur permet de fait d’améliorer leur rentabilité au moment où, dix ans après la crise, elles commencent à solder le poids de leurs litiges hérités du passé. La casse sociale est lourde : les dernières annonces vont de pair avec 800 suppressions de postes chez RBS, 1 230 chez Lloyds. 

Banquiers à domicile

D’autres insistent sur les risques de cette digitalisation à marche forcée pour les clients les plus pauvres, les plus ruraux ou les plus âgés, autrement dit les moins connectés. Les banques ont annoncé des mesures pour éviter de laisser ceux-ci sur le bas-côté. Lloyds ouvre des « micro-agences » ou des « agences mobiles » avec seulement deux collaborateurs équipés de tablettes (29 déjà ouvertes et 7 de plus prévues d’ici 12 mois). Barclays a lancé l’initiative « Digital Eagles » pour aider ses clients à basculer vers la banque en ligne. Quant à RBS, elle a mis en place dans ses agences des « TechXperts » et envoie des « community bankers » chez ses clients les plus vulnérables, ou dans les « community centers » (maisons de quartier ou foyers ruraux) pour recréer un service en face-à-face dans les zones rurales. Reste à voir si de tels dispositifs sont réellement à la hauteur des enjeux.

La Poste britannique pour alibi. À l’image de RBS, les banques peuvent aussi appeler leurs clients à se rabattre, quand leur agence disparaît, vers… le réseau de La Poste. Une initiative gouvernementale lancée l’an dernier prévoit que chacun puisse, au Royaume-Uni, gérer ses comptes au guichet de l’un des 11 500 bureaux de Poste du pays. Un dispositif qui permet à 93 % des Britanniques de disposer d’un espace à moins d’un mile (1,6 km) de chez eux pour y effectuer des dépôts ou des transferts. Et qui offre aux banques un alibi en or pour fermer des agences sans trop s’inquiéter des conséquences.