Le secteur extractif a contribué au produit intérieur brut (PIB) à hauteur de 2.784,1 milliards en 2015 et 2.764,6 milliards de francs en 2016. L’État escompte des recettes de 22.871.086.151 francs pour l’exercice 2017, soit 23 % du budget général. Cette hausse est occasionnée par l’entrée en production des compagnies minières de Kambove et Luisha Mining mais aussi par la reprise de la production de KCC. Et la contribution à la croissance du PIB réel serait de 2,1 % en 2017 pour le secteur primaire en général et le secteur extractif 1,7 % en particulier. Mais des analystes déplorent la persistance du phénomène « actes générateurs sans prévisions mais avec réalisation » qui ne permet pas de prendre la réelle mesure des recettes de l’État dans le secteur minier.
Assignations et recettes
Des limiers de la société civile, réunis mi-juin sous la coordination du Réseau gouvernance économique et développement (REGED), ont notamment mis à l’index la taxe sur l’autorisation d’achat des substances minérales autres que l’or et le diamant. Alors que cette taxe n’a pas porté des prévisions en 2015 et 2016, le ministère des Mines a cependant rapporté des réalisations de l’ordre de 6 448 130 francs pour 2015 et 5 322 928 FC pour 2016. Curieusement, aucune assignation n’a encore été prévue pour l’exercice 2017. L’on fait également part de la taxe sur l’autorisation d’achat des cassitérites. Force est de constater qu’aucune recette se rapportant au coltan n’a été officiellement rendue publique depuis 2005 par le ministère des Finances. Et par ailleurs, la Banque centrale du Congo (BCC) qui tient pour source le ministère des Mines et le CEEC, avance les chiffres de la production annuelle de dix prochaines années. Ceux-ci ne correspondent pas toujours avec ceux du ministère des Finances. Il y a, par exemple, un écart de près de 200 tonnes sur la production de 2013 entre les deux sources. Au cours de la même année, le Rwanda revendique avoir exporté 28 % de la production mondiale du coltan avec des chiffres bien détaillés: la Banque nationale du Rwanda (BNR) avance, en effet, des recettes du coltan de l’ordre de 134,5 milliards de dollars, pour une exportation de 2. 466,025 kg.
SAESSCAM en question
Le service de SAESSCAM qui est censé, selon le code minier, s’occuper de la petite mine évolue dans une totale opacité, de l’avis des experts. En 2015, ses assignations étaient de 84 131 330 francs, mais aucun rond n’a été versé par ce service d’assiette à la Direction générale des recettes administratives, domaniales, judiciaires et de participation (DGRAD). Autant qu’en 2016 où ses prévisions étaient de 69 450 375,4 francs. Pour l’exercice 2017, rien n’a été prévu. Les produits du Centre d’expertise, d’évaluation et de certification sous gestion, naturellement, du CEEC, sont, davantage confus: alors qu’aucune prévision n’a été mentionnée pour les deux précédents exercices, le CEEC a versé au Trésor public près de 340 millions de francs et environ 280 millions de francs, respectivement en 2016 et 2017.
Pour autant, dans le budget 2017, l’État n’attend rien du CEEC. Toutefois, il a décidé, pour 2017, de coller des assignations de plus de 592 millions de francs au CEEC pour ce qui est de la taxe rémunératoire de la valeur expertisée des substances précieuses. En 2015 et 2016, ladite taxe n’avait aucune prévision alors qu’elle a, respectivement, rapporté plus de 100 millions et 83 millions de francs. La DGRAD n’a rien perçu sur la redevance annuelle anticipative pour les laboratoires d’analyse de produits miniers marchands en 2015 et 2016. Mais en trois mois de gestion de Samy Badibanga, entre janvier et mars 2017, la redevance a rapporté plus de 333 millions à l’État, soit un taux de réalisation de 160 %.
Hélas, dans le budget de Tshibala, la redevance annuelle anticipative pour les laboratoires d’analyse des produits miniers marchands n’a pas été activée, sans justification aucune. Les droits d’octroi de carte d’exploitation artisanale des substances précieuses et semi-précieuse n’ont pas non plus été activés dans le budget 2017 alors qu’ils avaient précédemment rapporté plus de 15 millions de francs au Trésor public. La quotité de la taxe ad valorem à payer à chaque exportation de l’or, du diamant et des pierres de couleur de production artisanale pour le Trésor public a pratiquement été éteinte depuis 2015 alors que les exploitants artisanaux soutiennent la payer régulièrement auprès des commis de l’État. Alors qu’elles ont rapporté, ces dernières années, en moyenne 45 millions de francs, les ventes résiduelles de biens des établissements non marchands dont les droits de vente des cahiers de charge (DAO) pour l’attribution de gisements miniers n’ont pas d’assignation pour l’exercice 2017, le secteur minier a repris de plus belle.
Invité lors de l’analyse du budget 2017 effectuée, il y a peu, par la société civile, cet expert en mines estime que le service chargé de la gestion de la petite mine, SAESSCAM, fait figure de parent pauvre dans le secteur : pas d’allocations budgétaires conséquentes et son déploiement dans les 26 provinces pose problème alors que l’exploitation illicite des minerais comme la cassitérite, le coltan et le wolframite, l’or et le diamant par des exploitants artisanaux a tendance à devenir une activité normale. Le gouvernement a plutôt préféré poursuivre le déploiement du cadastre minier (CAMI) à travers le pays. En 2016, plus de 1,750 milliard de francs avaient été alloués à l’opération et 2,015 milliards de francs sont prévus en 2017. Par ailleurs, le gouvernement a programmé la création du Service géologique national avec plus de 7 milliards de francs. La Banque mondiale a encore porté ses préférences sur le projet Promines avec 5,8 milliards de francs en 2017, quand bien même l’apport du Promines dans le développement du secteur n’est guère perceptible.
Coulage des recettes
Les experts font aussi remarquer que les investissements sur ressources propres de l’État dans le secteur minier accusent des incohérences des chiffres en dépenses. Dans un document fourni par le ministère du Budget (Analyses explicatives des dépenses en 2017), les dépenses pour la réhabilitation des bâtiments et l’acquisition des véhicules terrestres sont de l’ordre de 902 840 934 francs, alors que dans le document sur le développement des titres et crédits 2017 fourni par le même service du ministère du Budget, les dépenses ne sont que de 702 840 934 francs. Plus de 200 millions de francs d’écart! La loi de finances publiques pour l’exercice 2017 et ses appendices ont été votés avec ces écueils par les deux Chambres du Parlement.
Par ailleurs, des analystes de la société civile ont fait remonter à la surface des pratiques susceptibles de passer pour des manœuvres dilatoires de coulage des recettes de l’État. Dans la rubrique « fonctionnement des ministères », les indemnités kilométriques prennent une grosse part de l’enveloppe, soit 204 304 455 francs et autres prestations, soit 395 342 508 francs pour le cabinet du ministre et 287 991 994 francs pour le secrétaire général, contrairement à d’autres cabinets tels que les Hydrocarbures qui n’ont que 74 154 517 francs et dont le secrétaire général n’a même pas d’indemnités kilométriques. Décidemment, les recettes des mines ont grise mine.