Publications des résultats annuels : le monde économique vit une réelle scission

Les marchés boursiers semblent avoir traversé rapidement une zone de turbulences car la trajectoire des indices semble retrouver une relative accalmie avec les publications des chiffres réalisés et des perspectives.

LA DIVULGATION des résultats annuels et des perspectives est une phase cruciale pour les entreprises parce qu’elle met très souvent en lumière des forces divergentes. Cette fois-ci, la photographie instantanée montre, d’un côté, les groupes technologiques, qui affichent des résultats stratosphériques malgré le contexte, ou plutôt grâce au contexte, devrait-on dire. L’acronyme francisé GAFAM pourrait même se substituer en Géants Acteurs aux Fructueuses Activités Mondiales. 

Ces sociétés profitent de leur pléthorique trésorerie pour élargir leurs terrains de prédilection sur de nouveaux secteurs comme l’automobile, la médecine, voire le sport. De l’autre côté, on retrouve les valeurs cycliques, à l’image des compagnies évoluant dans le tourisme ainsi que les pétrolières, qui affichent les pires pertes de leur histoire. Le monde économique connaît donc bien une réelle scission.

Après avoir signé la semaine dernière de janvier 2021 leur pire semaine depuis fin octobre 2020, les places financières ont violemment rebondi sur cette séquence hebdomadaire, rassurées par des bonnes statistiques, des publications trimestrielles qualitatives et les espoirs de l’adoption imminente du plan massif de soutien américain, lequel pourrait être approuvé sans l’aval des républicains aux États-Unis. Les craintes sanitaires se sont par ailleurs quelque peu estompées, avec la perspective d’une accélération des campagnes de vaccination dans les prochaines semaines, ravivant ainsi l’appétit pour le risque des intervenants.

Marché actions

Sur les cinq dernières séances, tous les grands indices ont repris de la hauteur. En Asie, le Nikkei, le Hang Seng et le Shanghai composite ont engrangé respectivement 4 %, 3.3 % et 0.4 %. En Europe, le CAC40 a progressé de 4.7 %, repassant ainsi en hausse de 1.9 % depuis le début de l’année tandis que son homologue allemand le Dax a gagné 4.6 %, inscrivant ainsi un nouveau record absolu (+2.5 % depuis le 1er janvier). Le Footsie s’est, pour sa part, adjugé 1.5 %. Pour les pays périphériques de la zone euro, l’Espagne a performé de 5.5 %, l’Italie de 7.1 % alors que le Portugal reste à la traîne, gagnant seulement 0.8 % sur la semaine. 

Outre-Atlantique, les valeurs technologiques ont mené le bal, permettant au Nasdaq100 d’inscrire un nouveau point haut avec une performance hebdomadaire de 4.8 %. Le S&P500 est aussi à son zénith, engrangeant 4.6 % tandis que le Dow Jones s’est adjugé 4 %. Gros plan sur T. Rowe Price Group Inc, un gestionnaire d’actifs américain basé à Baltimore. 

Au 31 décembre 2020, la société possédait plus de 1 470 milliards de dollars d’actifs sous gestion. L’entreprise propose à ses clients un large éventail de fonds communs de placement, de services de conseils tant pour les investisseurs privés que pour les institutionnels. La société a affiché en 2020 des revenus de 6.2 milliards de dollars, soit une croissance de 10 % par rapport à son chiffre d’affaires de 2019. Selon les prévisions des analystes, il devrait également augmenter en 2021 de plus de 17 %. 

L’entreprise génère par ailleurs des marges d’exploitation supérieures aux standards de son secteur. Avec une trésorerie nette de plus de 2 milliards de dollars, le groupe a su faire preuve de résilience durant la crise. Enfin, T. Rowe Price se paye un peu plus de 13 fois ses bénéfices de 2021, des multiples abordables compte tenu de la qualité des fondamentaux de l’entreprise. Depuis le 25 mars, et son plus bas annuel de 2020 à 85.42 dollars, le titre a repris plus de 87 %. Il suit désormais une tendance de fond haussière long terme.

Quant au marché obligataire, les écarts de rendement du Bund sur les instruments de dette de la périphérie se sont resserrés. Cette évolution est principalement due au climat plus optimiste sur les marchés financiers. La référence allemande se négocie sur une base de -0.35 %, l’OAT française remonte aussi à -0.25 % alors que les emprunts souverains à 10 ans émis par les pays du Sud de l’Europe se stabilisent, comme en Italie (0.52 %), qui vient de nommer Mario Draghi 1ER Ministre. 

Le Portugal et l’Espagne voient leurs emprunts d’États se rémunérer juste au-delà du zéro symbolique. Cette embellie sur les titres secondaires s’intensifie malgré les incertitudes économiques. Les investisseurs viennent chercher de la performance sur les taux positifs. Les gestionnaires des dettes étatiques profitent donc de ces conditions exceptionnelles de taux. Si les déficits explosent (120 % du PIB en France), la charge financière des intérêts se réduit considérablement, jusqu’à 50 % de moins pour la France. Aux États-Unis, le rendement du Tbond poursuit sa tendance ascendante et génère un taux rémunérateur de 1.13 %. Les espoirs sur le plan de relance ne sont pas étrangers à ce mouvement.

Marché des changes

Le dollar a progressé contre la plupart de ses pairs du Groupe de 10. En quatre jours, le billet vert a repris environ 200 points de base, pour se négocier vers 1.20 contre l’euro. La monnaie américaine évolue, par conséquent, à proximité de ses plus hauts depuis un mois, soutenue par des données prometteuses sur l’emploi. En contrepartie, les retards de livraison de vaccins en Europe semblent peser sur la monnaie unique. 

Outre-manche, la livre continue son chemin et grimpe à 1.37 contre le dollar, un plus haut de douze mois. Cette avancée se vérifie face au yen à 143.30 JPY, soit 800 points de base récupérés depuis trois mois. Même le franc suisse s’affaiblit contre la devise britannique, pour se négocier à 1.23 CHF (-500 points de base sur la même période de référence). Du côté de l’hémisphère sud, la Banque centrale australienne a décidé de maintenir son taux directeur à 0.1 % mais a signifié sa volonté de continuer à supporter l’économie par une politique monétaire accommodante en augmentant ses rachats d’actifs d’AUD à 100 milliards. Cette annonce surprise a immédiatement mis l’AUD sous pression à 0.76 dollar, contre un récent plus haut à 0.7820.

S’agissant des statistiques économiques, en Chine, la croissance de l’activité a ralenti, à l’image des indices PMI manufacturier et services Caixin ressortis respectivement à 51.5 et 52 (contre 53 et 56.3 le mois dernier). En zone euro, ces mêmes indices étaient légèrement meilleurs que prévu, ressortant à 54.8 et 45.4, traduisant toujours une contraction de l’activité des services. Le taux de chômage était stable à 8.3 % et le PIB ressort en baisse de 0.7 % au T4, une donnée un peu moins mauvaise qu’anticipé. L’indice CPI a progressé de 0.9 %, l’indice PPI de 0.8 % mais les ventes au détail de seulement 2 % (consensus 2.4 %).

Pour la région américaine, outre l’ISM manufacturier légèrement sous les attentes (58.7 contre 60.7 le mois dernier), toutes les données macroéconomiques ont agréablement surpris la semaine dernière. Les dépenses de construction ont grimpé de 1 %, les commandes industrielles de 1.1 % et l’ISM services est ressorti à 58.7. 

Au niveau de l’emploi, l’ADP a fait état de 174K créations de postes dans le privé et le rapport mensuel sur l’emploi était contrasté, avec un taux de chômage à 6.3 % mais seulement 49K créations d’emplois et un salaire horaire en hausse de 0.2 %.