Tony Elumelu : la pandémie offre une opportunité à l’Afrique de devenir plus productive et autonome

Le patron de la banque panafricaine UBA Plc était l’invité de The New York Institute qui a organisé la semaine dernière une table ronde virtuelle de haut niveau sur le thème « Un monde résilient : un appel africain pour un nouvel ordre mondial ». Pour lui, le continent africain a tout ce qu’il faut pour devenir fort, surtout en économie numérique.

C’EST un honneur et une marque d’estime pour Tony Elumelu. Le président de l’United Bank for Africa (UBA Plc) a participé à un débat de grand intérêt sur la pandémie de Covid-19. Ce débat a réuni des chefs d’État africains – Mahamadou Issoufou pour le Niger, Uhuru Kenyatta pour le Kenya, Alassane Dramane Ouattara pour la Côte d’Ivoire, Macky Sall pour le Sénégal et Julius Bio pour la Sierra Leone – mais aussi Ngozi Okonjo-Iwela, l’envoyée spéciale de l’Union africaine (UA) pour le Covid-19 et Tidjane Thiam, également envoyé spécial pour le Covid-19 en charge de la mobilisation du soutien économique international à l’Afrique.

Au cours de cette table ronde, Tony Elumelu a dit ceci : « Je vois cette pandémie comme une opportunité de réinitialiser l’Afrique. » Il a insisté que l’Afrique a vraiment « tout ce qu’il faut » pour devenir un continent fort en économie numérique. Mais, il y a des obstacles à franchir en termes de défis à relever. C’est pourquoi, le président de l’UBA Plc a souvent plaidé pour « un plan Marshall qui mobilise des ressources afin de résoudre des problèmes particuliers de l’Afrique » pour la rendre ainsi « moins dépendante » de « la circularité de la dette » des pays développés. Qui, d’après lui, est un « revers majeur depuis des décennies ».

« Lorsque nous engageons le reste du monde à fournir des secours, nous devons chercher une solution plus fondamentale aux défis de l’Afrique. J’ai souvent plaidé pour un plan Marshall des heures supplémentaires. Nous devons mobiliser tout le monde. Si nous avons un plan Marshall qui mobilise des ressources pour résoudre des problèmes particuliers, alors nous pouvons atténuer cette constante mendicité d’assistance », a déclaré le banquier et philanthrope nigérian.

Le pari à gagner

Pour Tony Elumelu, la pandémie de coronavirus qui ravage actuellement le monde est un momentum (conjoncture favorable) pour les Africains afin de « devenir plus productifs et autonomes ». Et de déclarer : « La vérité est que nous avons des ressources pour aider à mobiliser les gens. En tant que fondateur de la Fondation Tony Elumelu, nous nous sommes engagés à la doter de 100 millions de dollars pour soutenir les jeunes entrepreneurs africains et nous avons vu les résultats positifs que cela a produits jusqu’à présent. » 

Dès lors, a-t-il poursuivi, il est évident que si on améliore l’accès à l’électricité, on assure la stabilité de l’environnement macroéconomique, on garantit la priorité aux jeunes, on autonomise les petites et moyennes entreprises (PME) et on maîtrise la migration des jeunes, alors on peut dire que l’Afrique est prête à devenir une économie meilleure et plus résiliente. « Il est urgent de donner la priorité à nos jeunes et de responsabiliser nos PME. Les gens qui travaillent dur doivent être encouragés » : c’est l’appel lancé par Tony Elumelu, sans doute en direction des dirigeants africains.

Pour sa part, Tidjane Thiam a soutenu la vision du président de l’UBA Plc : « Plutôt que de dépendre de l’aide internationale à chaque fois, il est nécessaire que les gouvernements et les institutions investissent dans des activités qui donneront la priorité aux jeunes et créeront un meilleur environnement favorable. Je suis totalement d’accord avec Tony Elumelu, le défi majeur est que nous ne voyons pas suffisamment d’entrepreneurs, comparé à ce qui se produit en Asie et en Europe. Il est donc nécessaire de promouvoir une classe d’entrepreneurs pour stimuler l’économie africaine. Nous devons préparer plus de Tony Elumelu d’Afrique. »

Ce dont l’Afrique a besoin, a souligné Tidjane Thiam, c’est que « les gouvernements et les institutions multinationales apportent des capitaux pour qu’il y ait des investissements dans la santé, les infrastructures et dans les autres secteurs ». Pour lui, l’Afrique doit « se débarrasser de ce cycle de la dette » parce que le rééchelonnement constant et la demande d’allègement des dettes ne sont pas bons pour elle en tant que continent.

Et Dr Ngonzi Okonjo-Iwela a tourné son regard vers la même direction, en appelant à « un système où les jeunes et les femmes seront autorisés à créer et produire davantage pour stimuler l’économie africaine ». De son point de vue, les organismes parapublics privés et gouvernementaux devraient s’engager dans des « partenariats significatifs qui aideront à galvaniser la création d’emplois et l’entreprenariat chez les jeunes en Afrique ». « Comme Tony Elumelu l’a souligné, nous pouvons voir cette pandémie comme une opportunité pour le continent. Nous avons l’Accord de libre-échange africain et nous devons le concrétiser », a-t-elle souligné.

Et de poursuivre : « Nous devons spécialiser nos pays pour fabriquer les produits dont nous avons besoin afin de pouvoir commercer avec les autres. Nous devons créer de bons emplois pour nos jeunes. Nous devons autonomiser nos femmes et nos jeunes et les mettre au centre. On dit que l’Afrique compterait le plus grand nombre de jeunes au monde d’ici 2050, nous devons donc y remédier. »