Transparence fiscale : des multinationales montrent la voie

Certaines entreprises pétrolières, gazières et minières soutenant l’ITIE publient déjà des rapports pays dans lesquels elles ont leurs activités économiques sur les paiements versés à l’État. Cette exigence concerne aussi les sociétés extractives établies dans l’Union européenne, au Canada et en Norvège au titre de leurs activités mondiales.

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ES SOCIÉTÉS extractives soutenant l’Initiative pour la transparence des industries extractives (ITIE) prennent des mesures encore plus importantes en matière de transparence des contrats. Shell, Eni, BHP, Repsol et Rio Tinto comptent parmi ces entreprises qui publient désormais des « Déclarations pays par pays ». Celles-ci reprennent l’activité économique de chacune d’elles dans chaque État où celle-ci est présente. Dans leurs déclarations, ces entreprises divulguent le montant de leur impôt sur les bénéfices, fournissent des informations supplémentaires sur les revenus, les bénéfices ou les pertes, l’emploi, les actifs et le capital déclaré dans chacun des pays où l’entreprise concernée déploie ses activités. 

Ces informations relatives à l’activité économique d’une entreprise dans chaque État permettent de placer le montant des paiements dans leur contexte. Les déclarations contiennent également des informations sur la présence de l’entreprise dans les États à faible imposition. 

Cependant, certaines informations communiquées ne sont pas aussi détaillées que les informations figurant dans les déclarations des « paiements versés à l’État » exigées par l’Union européenne (UE), le Canada et la Norvège. Ainsi, ces déclarations ne comportent généralement pas d’informations sur les paiements non fiscaux.

Déclaration pays par pays

Pourquoi divulguer ces informations ? Eni et Shell comptent parmi les grandes sociétés pétrolières et gazières internationales qui se lancent dans les déclarations pays par pays. 

Pour ces deux entreprises, les avantages des déclarations détaillées consistent à informer les parties prenantes, à instaurer la confiance et à contribuer à un débat plus large sur la transparence fiscale. À travers les déclarations pays par pays, Eni et Shell montrent qu’elles tiennent leurs engagements. Giorgio Bigoni, le directeur de la fiscalité internationale d’Eni, déclare : « La déclaration pays par pays est un outil efficace qui permet aux parties prenantes d’obtenir des informations sur les pays dans lesquels Eni exerce ses activités et sur le montant des impôts versé en conséquence, correspondant à la valeur des activités extractives générée dans ce cadre. » Et d’ajouter : « Le paiement du montant juste en temps voulu dans chaque pays où nous exerçons nos activités, ainsi que le respect des règles par une détermination de l’impôt fondée à la fois sur la lettre et sur l’esprit de la loi figurent parmi les principes fondamentaux de la stratégie fiscale d’Eni. »

Pour sa part, Alan McLean, le vice-président exécutif Imposition, contrôleur de Shell et membre du conseil d’administration de l’ITIE, souligne l’adhésion de l’entreprise aux principes de fiscalité responsable de B Team. L’un de ces principes est axé sur la transparence de la stratégie des entreprises concernant la fiscalité et les impôts payés. « Notre rapport sur la contribution fiscale vise à montrer comment nous appliquons les principes de fiscalité responsable de B Team, une initiative à laquelle Shell s’est ralliée en 2018 afin de mettre davantage en adéquation sa stratégie fiscale avec les meilleures pratiques émergentes », explique-t-il.

Eni et Shell estiment que leurs déclarations respectives représentent une étape importante dans le renforcement de la transparence. « La publication de la déclaration pays par pays confirme l’attachement d’Eni à la transparence », affirme Giorgio Bigoni. 

Et Alan McLean d’ajouter : « Nous considérons le rapport de Shell comme une étape de plus vers une plus grande transparence. » En tant qu’entreprises pétrolières et gazières soutenant l’ITIE, Eni et Shell sont tenues de divulguer publiquement le montant de leurs impôts et des paiements effectués, conformément aux attentes sur le compte des entreprises soutenant l’ITIE. À travers la publication des déclarations pays par pays, les deux entreprises montrent leur volonté de respecter cette attente et de s’en faire les chantres.

Faire avancer le débat

Quant aux parties prenantes, les déclarations pays par pays marquent une évolution. « Nous avons incontestablement le sentiment d’avoir franchi un cap en matière de transparence des entreprises et que le renforcement du cadre actuel de déclaration publique pays par pays suit désormais sa propre dynamique », note Sigrid Klæboe Jacobsen, la directrice exécutive du Réseau justice fiscale/Norvège. « La transparence prouve son utilité à un vaste ensemble de parties prenantes, parmi lesquelles les investisseurs et les agents des impôts. » Les sociétés extractives mettent également en relief les avantages qu’offre ce nouveau type de déclaration. 

« L’accueil extrêmement positif réservé au rapport de Shell sur la contribution fiscale par le personnel a dépassé nos attentes. Susciter l’intérêt de nos employés et obtenir leur soutien continue de nous motiver dans notre travail en matière fiscale et dans les autres domaines », fait remarquer  Alan McLean. Quant à Eni, sa déclaration a favorisé le dialogue, en incitant diverses organisations à demander des informations sur les questions spécifiques figurant dans sa déclaration pays par pays.

Selon le Réseau justice fiscale/Norvège, cependant, des progrès restent à faire. Notamment pour « veiller à ce que les données soient enregistrées, contrôlées et publiées de manière standardisée », selon Sigrid Klæboe Jacobsen. « Nous voulons que les déclarations pays par pays comprennent un éventail plus large de données pour placer les informations fiscales dans leur contexte, et que cela soit étendu à tous les secteurs économiques. »

Les multinationales du secteur de l’énergie ont le pouvoir d’influer sur les normes en matière de transparence. Pour Shell, la pratique émergente de la déclaration pays par pays peut faire avancer le débat mondial sur la transparence fiscale, avec d’autres entreprises, et contribuer ainsi à mettre en place des régimes fiscaux justes, efficaces et stables qui profitent à la société dans son ensemble. 

En plus des informations sur les revenus, les bénéfices ou les pertes, les actifs et les capitaux publics de chaque pays où l’entreprise déclarante mène des activités, les déclarations contiennent des informations sur la présence de l’entreprise dans des juridictions à faible taux d’imposition.